„Notre génération est consolée!“

2021 ◽  
Vol 46 (181) ◽  
pp. 19-29
Author(s):  
Wolfgang Asholt

Selon le Trésor de la langue française, le substantif ‚libertaire‘ apparaît pour la première fois dans l’essai philosophique de Pierre-Joseph Proudhon De la justice dans la Révolution et dans l’Eglise paru en 1858, dans lequel il revendique une société juste où les individus seraient des sujets libres. Mais l’œuvre de référence aurait pu aussi renvoyer à une revue qu’un „précurseur de l’anarchisme“ (Maricourt), Joseph Déjacque, édite à New York et qui s’appelle Le Libertaire (1858-1861), même si cette revue était certainement peu connue et lue dans la France du Second Empire (Asholt 1998: 351-363). Déjacque avait dû s’exiler en 1851 et l’étude citée a fait condamner Proudhon et l’a obligé à s’exiler. Vallès, grand lecteur de Proudhon, avait publié un an plus tôt une première œuvre avec laquelle il se fait remarquer: L’Argent (1857) qui est un hypertexte du Manuel du spéculateur de Bourse de Proudhon paru en 1856, où celui-ci revendique de remplacer „l’anarchie industrielle“ du capitalisme par la „République industrielle“, c’est-à-dire le fédéralisme et le mutuellisme (Asholt 1984: 5-15). Si deux représentants du début de l’anarchisme en France se servent de cette notion de ‚libertaire‘, elle doit faire partie de leur vocabulaire philosophique et idéologique. Mais, malgré ce contexte, cette notion ne devient véritablement une référence pour l’anarchisme que vers la fin du XIXe siècle où des auteurs comme Zola ou Anatole France s’en servent.

Hawliyat ◽  
2018 ◽  
Vol 14 ◽  
pp. 117-129
Author(s):  
Daisy Ghazi-Khalifé

George Sand a beaucoup embelli ses Berrichons et, pour les décrire, elle a choisi les couleurs les plus tendres de sa palette. Mais alors que ses romans apparaissent comme la poésie d'un rêve terrien plutôt que la présence même de la terre, La vie d'un simplel dEmile Guillaumin « est d'abord un document de premier ordre sur la vie paysanne en France au XIXe siècle »2. Guillaumin parle très bien des laboureurs et sait les faire parler parce qu'il était lui-même un laboureur. De même Marguerite Audoux, dont la vie est étroitement liée à son œuvre, raconte dans Marie-Claire l'histoire d'une petite bergère en Sologne à la fin du Second Empire et au début de la IIIe République. Ces deux ouvrages recomposent avec une admirable précision de détails la vie des paysans français à une certaine époque de l'histoire.


1996 ◽  
Vol 17 (1) ◽  
pp. 107-134
Author(s):  
Michel-Louis Martin

Dans tout système social, la tension entre d’une part les managers de la violence année, qui à ce titre participent de l’essence étatique, et d’autre part les autorités politiques responsables de l’administration de l’Etat, est presque toujours accentuée par l’évolution contrastée des valeurs dont procèdent la société et le corps militaire. Rarement synchiones en effet, ces normes ainsi que les comportements et les solidarités qu’elles induisent, apparaissent du côte des armes en avance ou bien en retard par rapport à l’ensemble social parent. La France n’échappe pas à cette tendance quand elle n’en est pas l’illustration meme, où de manière continue, les forces armées ont servi de refuge aux tenants de principes plus ou moins en opposition aux pouvoirs publics et à la société. Ainsi, par exemple, les troupes royales sous I’Ancicn Régime passent-elles pour le lieu d’accueil privilégié d’une noblesse souvent nostalgique du moyen-âge et des modes féodaux d’organisation sociale. Sans imaginer remettre en cause la légitimité capétienne, elles se démarquaient cependant plus ou moins consciemment de l’effort de construction de l’Etat moderne entrepris par la monarchie. Au contraire, à la suite de la Révolution et pendant la première moitié du XIXe siècle, l’armcc est considérée sous l’Empire et plus encore sous la Restauration et la Monarchie de Juillet comme regrettant confusément les principes républicains avec d’ailleurs les possibilités de promotions rapides qu’ils impliquaient : le souci de la police de surveiller les officiers comme autant de conspirateurs potentiels montre qu’à l’époque ils faisaient figure de menace pour l’ordre établi. Par un revirement caractéristique, l’institution militaire s’affirme et se perçoit sous le Second Empire et la Troisième République comme plus conservatrice, refuge pour des officiers d’origine aristocratique ou se prétendant tels, qui y voient une façon de servir la France sans se compromettre avec le régime politique. Après la Seconde Guerre mondiale, cl avec l’avènement progressif d’un assez large consensus dans la société française autour de quelques valeurs politiques, économiques et sociales, le rôle de l’armée comme site d’opposition au nom d’idées autrefois en honneur et désormais contestées, s’atténue. Elle n’en demeure pas moins un espace où un certain nombre de principes tels que la défense de la nation et l’esprit de sacrifice, se trouvent préserves.


2021 ◽  
Author(s):  
Diletta Guidi

Paris, Kuala Lumpur, New York, Doha, Berlin, Honolulu, La Chaux- de-Fonds : chacune de ces villes accueille un musée d’art islamique, et bien d’autres encore s’ajoutent à cette liste. Depuis les années 2000, et en particulier au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, de plus en plus d’institutions culturelles investissent en effet ce secteur culturel. Dans ce contexte d’« islamania » muséale internationale, ce livre se penche pour la toute première fois sur le cas de la France, à travers les exemples du Musée du Louvre et de l’Institut du monde arabe. En analysant les mises en scène de l’islam depuis les Expositions coloniales du XIXe siècle à nos jours, cet ouvrage montre qu’il est à la fois utilisé par l’État français pour gérer l’altérité islamique et le reflet de politiques publiques à l’égard de la religion musulmane. Plus largement, le traitement muséal de l’islam permet de réfléchir à la régulation du religieux, et par conséquent à la laïcité. Il illustre aussi les tensions politiques et sociales qu’entraînent la présence de l’islam en France et, par extension, la place de l’autre dans les sociétés occidentales désormais multiculturelles et globalisées. S’intéresser à l’« islam des musées » dépasse ainsi l’observation de l’histoire d’un genre artistique, cela permet de rendre compte d’une partie de notre histoire culturelle, politique, sociale et religieuse. Diletta Guidi est docteure en lettres et en science politique. Elle a étudié l’histoire de l’art et la sociologie des religions en France, aux Émirats arabes unis, au Canada et en Suisse. Elle est actuellement maître-assistante à l’Université de Fribourg. Cet ouvrage est issu de sa thèse de doctorat, qui en 2020, a reçu le prix Vigener pour la meilleure thèse de la Faculté des lettres de Fribourg.


Tangence ◽  
2008 ◽  
pp. 29-46
Author(s):  
Hélène Destrempes

Résumé La figure de l’Amérindien habite l’imaginaire québécois et canadien-français depuis les débuts de la colonie. Plusieurs critiques réputés, comme Maurice Lemire, Fernand Dumont et Gérard Bouchard, en ont confirmé la présence, pour ne pas dire l’omniprésence, dans les discours politiques et culturels au Québec. Et pourtant, il n’y a eu jusqu’à présent qu’un nombre assez restreint d’études portant sur la nature et le rôle que joue cette figure dans l’économie de la problématique identitaire au Québec. Dans le cadre de recherches portant sur l’analyse des contraintes architextuelles et narratives s’exerçant sur les figures de l’Indien dans la littérature canadienne-française au xixe siècle, nous avons développé un nouveau modèle interprétatif fondé sur le concept de réduction, modèle inspiré par les travaux de Jean-Jacques Simard sur les politiques et les stratégies gouvernementales canadiennes dans le dossier des affaires autochtones. Dans un premier temps, nous esquissons ici le potentiel heuristique de cette notion de réduction, avant de proposer ensuite une analyse de deux contraintes paratextuelles qui ont conditionné, à leur façon, la mise en discours de la figure de l’Indien dans la littérature canadienne-française au xixe siècle : les titres et les intertitres des oeuvres mettant en scène des personnages amérindiens.


2021 ◽  
Vol 6 (2) ◽  
pp. 35-53
Author(s):  
Mohamed Bourasse

A lire Illusions perdues, le premier constat qui frappe le lecteur, est l’extrême diversité du langage de ses personnages. Balzac ouvre sa langue littéraire sur une infinité de discours oraux et écrits, de nature familière, régionale, diachronique.... Et ce, par l’usage d’une palette diverse de variantes linguistiques, se répartissant en sociolectes, idiolectes, régiolectes…, phénomène que certains chercheurs appellent ‘’l’hétéroglossie[1] littéraire’’. Tous les types de variation parsèment le roman et la langue balzacienne n’est pas homogène et monolithique, mais hétérologique et hétéroglossique. Notre objectif dans cette réflexion est de problématiser cette notion d’hétéroglossie littéraire dans une perspective littéraire et sociolinguistique (variationniste). Pour ce faire, nous étudierons les raisons et les motivations de cette pratique, ainsi que ses effets et ses fonctions. Aussi, nous examinerons les écueils que ce phénomène peut produire dans l’œuvre.   [1] Terme de Rainier Grutman. In : Grutman, R. Des langues qui résonnent. L’hétérolinguisme au XIXe siècle québécois. Montréal : Fides/Cétuq, 1997.


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