Accompagner les familles migrantes en situation irrégulière
Depuis maintenant plusieurs décennies, les transformations de l’État providence associées à une précarisation croissante de la société ont profondément redessiné les contours du travail social. Ces évolutions exposent les professionnels concernés à des difficultés nouvelles qui mettent en tension la dimension éthique de leurs interventions. L’accompagnement des familles migrantes en situation irrégulière est particulièrement concerné par ces enjeux. À partir d’une enquête sociologique réalisée dans une association assurant l’hébergement de ces familles, cet article expose les limites d’une forme d’action sociale qui consiste à venir en aide à une population à laquelle on refuse le droit de séjourner en France. Ce mandat, pour le moins paradoxal, soumet les intervenants à des contradictions fortes qui les amènent à repenser les modalités de leur engagement auprès du public. Au croisement d’enjeux politiques, éthiques et institutionnels se dessine alors une nouvelle économie morale de l’intervention sociale, à l’aune de laquelle se construit le sens de l’action et se recompose la pratique professionnelle.