RÉSUMÉ
Cet article porte sur le processus de professionnalisation des infirmières au Québec, au début du 20e siècle. En remontant aux origines de la profession, il s'agit d'étudier comment des infirmières, sur la base du savoir féminin — « care » —, ont procédé pour établir leur métier puis en faire une profession, et inscrire leur rôle dans le vaste champ de la santé. C'est notamment par le biais des associations professionnelles, que les infirmières vont réussir à transformer leur participation dans ce domaine, au départ associée au travail bénévole et charitable, en travail professionnel salarié.
Deux hôpitaux montréalais — l'Hôpital général de Montréal et l'Hôpital Ste-Justine — permettront de suivre les étapes de ce processus qui mène à la création de l'Association des gardes-malades enregistrées, en 1920. Seront mises en parallèle les stratégies utilisées par différents réseaux de femmes, anglophones et francophones, pour valoriser des pratiques et des savoirs reliés au soin et à l'entretien du corps. Les unes, de l'Hôpital général de Montréal, s'appuient sur un ensemble de savoirs spécifiques pour affirmer leur compétence propre, tandis que les autres, de l'Hôpital Ste-Justine, ont recours à la communauté de femmes pour obtenir la reconnaissance du rôle nouveau des femmes dans l'organisation de la santé publique. Chaque groupe réalise toutefois l'importance de fonder sa démarche sur l'amélioration de l'éducation et sur une plus grande formalisation des soins infirmiers. C'est pourquoi, les infirmières se doteront rapidement d'associations autonomes, en vue d'établir les critères et le standard d'accès à la profession auprès des instances publiques.