scholarly journals Structuration de la biodiversité des forêts africaines et changements climatiques : une étude à travers le genre Khaya (Meliaceae)

2019 ◽  
Vol 339 ◽  
pp. 95
Author(s):  
Ulrich Gaël Bouka Dipelet

Des études paléoécologiques suggèrent que la composition floristique, la structure et la répartition actuelle des forêts denses africaines ont été fortement influencées par la mise en place de gradients écologiques, favorisant la spéciation parapatrique. De plus, lors des changements climatiques passés, certains « refuges forestiers » auraient été peu ou pas affectés par les variations climatiques, favorisant une spéciation allopatrique des espèces forestières. En Afrique, les rôles respectifs de ces deux mécanismes sont encore peu étudiés.Nous abordons cette problématique à travers le genre Khaya (Meliaceae, acajous d’Afrique), un genre modèle dont les espèces présentent des affinités écologiques variables, depuis les savanes arborées jusqu’aux forêts denses humides sempervirentes. La combinaison d’analyses génétiques et morphométriques a permis de mettre en évidence l’existence de plusieurs groupes distincts dans le complexe K. anthotheca, suggérant l’existence de cinq taxons différents. Trois de ces taxons présentent des distributions allopatriques ou parapatriques, et deux d'entre eux se retrouvent localement en sympatrie, dont un taxon nouveau pour la science. Ces taxons présentent des spécificités que l’on peut expliquer tant par des mécanismes de spéciation parapatrique qu’allopatrique, en lien avec les gradients écologiques et les changements climatiques passés. À l’opposé, la présence de deux clusters génétiques de K. ivorensis, dus à un isolement par la distance, ne permet pas de séparer deux taxons mais suggère l’ébauche d’une spéciation qui n’est pas encore aboutie. En effet, les populations des deux clusters partagent certains haplotypes chloroplastiques et mitochondriaux retraçant des histoires évolutives différentes pour chaque marqueur.L’existence de plusieurs taxons au sein de K. anthotheca et la confirmation de K. ivorensis en tant que taxon unique et bien séparé ont conduit à la révision taxonomique du genre. La description des taxons a été totalement refondue et une nouvelle clef de détermination est présentée. Ces nouvelles connaissances permettent d’éclairer l’histoire évolutive des acajous du genre Khaya et la structuration de la biodiversité des forêts africaines afin de poser les bases d'une stratégie de conservation et de gestion durable de ces essences très recherchées tant pour leur bois que pour des usages médicinaux.

Author(s):  
Charlélie Bénard ◽  
Agathe Blanchette-Sarrasin ◽  
Alessandro Pozzi ◽  
François Vachon

Certain(e)s chercheur(euse)s attribuent l’inefficacité des politiques environnementales à différents facteurs cognitifs. Cependant, leurs mécanismes sous-jacents sont encore méconnus. Une récente proposition théorique suggère l’existence d’une origine commune entre plusieurs de ces distorsions cognitives. Afin de tester cette proposition, la présente étude vise à établir une relation entre deux biais cognitifs, soient les croyances compensatoires vertes et l’illusion d’empreinte écologique négative. Pour ce faire, 114 participant(e)s remplissent quatre questionnaires portant respectivement sur chacun des deux biais, ainsi que sur la désirabilité sociale et l’identité verte. Les résultats aux questionnaires ne montrent aucune relation entre les croyances compensatoires vertes et le biais d’illusion d’empreinte écologique négative, remettant en question l’idée qu’un biais de moyennage soit à l’origine de ces deux phénomènes. Sans réfuter l’existence de ce mécanisme, il semble que l’identité verte pourrait davantage prédire la présence de croyances compensatoires vertes, tandis que la désirabilité sociale permettrait de prévoir, du moins en partie, la manifestation de l’illusion d’empreinte écologique négative. Des études futures pourraient ainsi considérer l’ajout de variables médiatrices au cadre théorique.


2015 ◽  
Vol 139 (2) ◽  
pp. 4-13
Author(s):  
Stéphanie Pellerin ◽  
Vincent Arricastres ◽  
Lauriane Long-Raymond ◽  
Martin Lavoie

La tourbière de l’île Notre-Dame a été créée il y a 35 ans dans le cadre des « Floralies Internationales de Montréal – 1980 » à partir de blocs de tourbe de surface prélevés dans une tourbière de la région de la baie James vouée à l’ennoiement. Nous avons étudié les changements survenus dans la composition floristique de cette tourbière sous les angles spécifique (les espèces) et fonctionnel (traits fonctionnels). Entre 1979 et 2014, une baisse de 48 % de la richesse globale a été observée, ainsi qu’une augmentation importante de la représentation des espèces exotiques, généralistes et méridionales. Seules 5 des 56 espèces trouvées originalement sont encore présentes aujourd’hui sur la tourbière. Des changements importants ont aussi été notés entre les traits fonctionnels de la flore de 1979 et ceux de la flore de 2014. Ainsi, les besoins moyens en acidité, en humidité et en matière organique dans le substrat ainsi qu’en lumière ont significativement diminué. En revanche, les besoins moyens en nutriments dans le sol ont significativement augmenté. Ces changements indiquent que le site évolue vers un environnement plus sec et plus riche, de moins en moins caractéristique d’une tourbière. En conclusion, nous présentons quelques suggestions pour accroître la réussite des projets de création de milieux humides.


2019 ◽  
Vol 341 ◽  
pp. 3
Author(s):  
Regis Peltier

Avec une population estimée à dix milliards d’habitants dans quelques décennies, l’avenir du monde intertropical sera obligatoirement entre les mains des êtres humains. Ceux-ci protégeront une petite partie des forêts dites naturelles afin d’essayer d’y conserver la biodiversité qu’elles abritent ; ils géreront de façon plus productive une autre partie, ce qui passera très probablement par une simplification de leur diversité, dans la mesure où l’on favorisera les espèces les plus productives, les plus faciles à régénérer et dont les produits seront faciles à industrialiser et à vendre.Et entre la forêt protégée et la forêt aménagée, que restera-t-il ? Des plantations monospécifiques de bananiers, de riz, de cacaoyers, de coton ? Mais alors, comment les espaces forestiers pourront-ils évoluer en échangeant du matériel génétique, s’adapter aux changements climatiques, résister aux maladies nouvelles, etc. ?Les écologues estiment que la forêt ne pourra survivre que s’il existe des liens de continuité entre les massifs forestiers. La connectivité écologique ne pourra que très rarement être assurée par des corridors forestiers continus. L’existence d’îlots forestiers discontinus mais proches et à distance régulière permet le passage en « pas japonais » de nombreuses espèces végétales et animales, mais pas de toutes. Les micro-organismes et la macrofaune des sols forestiers ne peuvent se déplacer qu’à la condition d’une certaine continuité dans la trame arborée. Celle-ci n’est possible que par la présence d’arbres dans les zones cultivées, voire urbanisées. L’agroforesterie est la voie la plus prometteuse pour assurer cette continuité écologique.L’agroforesterie consiste à associer des arbres avec l’agriculture et/ou l’élevage, au niveau des parcelles, des exploitations ou des paysages. Les systèmes traditionnels, à faibles niveaux d’intrants, étaient et sont encore agroforestiers ; mais l’agriculture industrielle à hauts niveaux d’intrants (cf. mécanisation du travail, apport d’engrais, d’herbicides, de semences très améliorées, voire génétiquement modifiées) a, en général, exclu l’arbre des parcelles.Aujourd’hui, de nombreux agronomes, pastoralistes et forestiers travaillent ensemble pour appuyer techniquement et politiquement le retour des arbres dans l’espace agricole et pastoral.La diffusion à grande échelle de méthodes standardisées, mises au point en station de recherche, a rarement marché en milieu tropical. Par exemple, la culture en couloirs, mise au point par l’Icraf1 dans ses stations du Kenya au cours des années 1980, n’a pas été adoptée par les agriculteurs. Elle nécessitait trop de travail pour rabattre régulièrement les rejets d’arbres et limiter le développement de leurs racines, sans résoudre le problème de l’acidification des sols.Croire que l’agroforesterie permettra de stopper les défrichements forestiers par les agriculteurs essarteurs (sur abattis-brûlis) est également une erreur d’analyse. Il est certes vrai que l’agroforesterie permet aux agriculteurs qui la pratiquent de récolter chez eux de nombreux produits qu’ils récoltaient autrefois en forêt ; elle facilite également la culture continue sur le même sol, sans avoir à défricher de nouvelles forêts. Cependant, tant que les gouvernements laisseront les agriculteurs s’approprier des terres en défrichant la forêt publique, puis en la brûlant et en la mettant en culture, ceux-ci continueront à utiliser cette pratique qui permet d’étendre son capital foncier et de cultiver, avec peu de travail et une bonne production, pendant au moins une trentaine d’années.Les systèmes agroforestiers, qui permettent de répondre à presque tous les besoins d’une famille sur une surface limitée, nécessitent une bonne technicité pour limiter les concurrences entre espèces végétales et animales, récolter les différents produits – il est par exemple difficile d’abattre un arbre, pour en récolter son bois, sans écraser les cultures associées – et demandent un travail soutenu. C’est pourquoi les systèmes agroforestiers les plus performants se rencontrent dans les pays où la densité de la population rurale est la plus forte et où les forêts ont disparu (lakous d’Haïti, jardins agroforestiers de Java, bocage Bamilèkè et parcs arborés sur terrasses Kapsiki au Cameroun). Les résultats les plus probants, en matière de diffusion des systèmes agroforestiers au cours des trois dernières décennies, résultent du respect de modalités présentées ci-après :- L’accès aux forêts est limité, soit de fait lorsqu’il n’en existe plus, soit par décision du gouvernement qui met des forêts « sous cloche », en créant des forêts protégées définitivement (parcs et réserves) ou temporairement (capital foncier pour l’avenir), ce gouvernement ayant les moyens de faire appliquer cette politique, ce qui est très rarement le cas (ex. : Costa Rica, certains États de l’Inde).- On apporte une subvention durable aux agriculteurs qui conservent de jeunes arbres pour restaurer ou étendre leurs systèmes agroforestiers. C’est le cas de l’extension des parcs à Faidherbia albida au Nord-Cameroun, la subvention étant financée par un prélèvement sur la vente du coton. Également, les agroforestiers sont subventionnés pour les services écosystémiques qu’ils rendent à une communauté solvable ; tel est le cas des têtes de bassins versants approvisionnant une ville en eau en Inde ou au Costa Rica. En dehors des zones tropicales, ailleurs dans le monde, la plantation de haies bocagères est financée, notamment par la PAC2 en Europe.- On valorise les produits issus des systèmes agroforestiers en leur donnant des labels, qui permettent de les vendre plus cher à des consommateurs engagés (cas du café bio et équitable et du bois d’œuvre au Nicaragua).- On sécurise le foncier, ce qui garantit à l’agriculteur que les arbres qu’il plante pourront être récoltés par lui ou ses héritiers (exemple de la loi Gestion locale sécurisée, à Madagascar).- On encourage chaque agroforestier à adapter le système à ses possibilités (conditions écologiques, sociales, économiques) et à son accès aux marchés. Par exemple, dans l’Ouest-Cameroun, les agriculteurs éliminent de leurs haies des arbres devenus sans valeur (exemple : ficus producteurs de fibres végétales) pour les remplacer par des fruitiers ou des arbres producteurs de bois de sculpture et de menuiserie, de plus en plus recherchés en ville.Sans être une panacée qui permettra de bloquer le défrichement des forêts, l’agroforesterie est une nécessité absolue pour assurer aux populations du monde tropical une partie des biens et des services qui étaient autrefois rendus par les forêts. Par ailleurs, elle permettra aux forêts conservées d’être moins sollicitées par les populations, et elle contribuera à assurer leur survie à long terme, en facilitant le flux et l’évolution des ressources génétiques forestières.


2007 ◽  
pp. 85-92
Author(s):  
A. Heduit ◽  
R. Pujol ◽  
B. Tisserand ◽  
X. Delebarre ◽  
T. Pichard

1965 ◽  
Vol 20 (5) ◽  
pp. 899-922 ◽  
Author(s):  
Emmanuel Le Roy Ladurie

Ces dernières années, diverses réunions scientifiques ont pris pour thème de leurs discussions les fluctuations climatiques récentes : ainsi, une conférence, convoquée à New York en 1961, sous les auspices de la société météorologique américaine, a étudié les changements climatiques et les phénomènes géophysiques s'y rapportant. Le colloque international d'Obergürgler (septembre 1962) s'est consacré aux « variations des glaciers existants » et aux causes qui déterminent ces variations. Quant à la conférence d'Aspen (Colorado, juin 1962), organisée par le Comité de Paléoclimatologie de l'Académie des Sciences des États-Unis, elle se situe dans le même courant de recherche fondamentale : son objet, c'est, en effet « le climat des XIe et XVIe siècles ».


1957 ◽  
Vol 12 (1) ◽  
pp. 60-70 ◽  
Author(s):  
B. Bennassar
Keyword(s):  

La correspondance de Simon Ruiz, marchand de Médina del Campo n'est plus inédite ; elle est même, pour longtemps encore, à l'ordre du jour de la recherche historique qui a mis en chantier une prospection systématique de cette source unique de renseignements. Les travaux de Henri Lapeyre, de Gentil da Silva, de Felipe Ruiz Martin l'ont largement utilisée. Mais cette correspondance surabondante défie tout examen général. De nombreuses lettres venues de presque toutes les grandes villes d'Espagne sont encore inconnues et risquent de le rester longtemps. Aucun doute, parmi ces liasses, que les lettres de Séville ne soient parmi les plus intéressantes, ainsi qu'un bref examen, — l'objet même de cet article, — m'a permis de l'établir.


1959 ◽  
Vol 14 (2) ◽  
pp. 348-349
Author(s):  
Fernand Braudel
Keyword(s):  

D'un coup de chapeau, ou le verre en main, saluons le 100e numéro» (double d'ailleurs, juillet-août, septembre-octobre 1958) des Cuadernos Americanos. Ce sera attirer l'attention, comme il convient, sur une revue sympathique, intelligente et libre, j'allais dire courageuse, mais la liberté ne va jamais sans courage.” Nous nions, écrit son Directeur, qu'aucune nation, pour forte qu'elle soit, ait le droit d'intervenir chez une autre nation, si grande que soit la faiblesse de cette dernière… ». Ces paroles sont d'or, elles ne relèvent pas d'une rhétorique de convention : au fil des jours et des années, les Cuadernos ont su montrer qu'ils étaient une tribune libre et protester à très haute voix quand il le fallait, c'est-à-dire assez souvent.Fondés le 29 décembre 1941, à un moment difficile de l'histoire du monde, ils ont été dès le principe et ils sont encore aujourd'hui l'oeuvre commune d'un groupe d'amis que domine la haute et sympathique silhouette directoriale de Jésus Silva Herzog, économiste, écrivain-né, orateur admirable, ancien ministre des Finances au temps de la nationalisation des pétroles, avant tout homme de coeur et de courage.


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