Revue Internationale des Francophonies - Rapport entre médias et religions
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Published By Universite Jean Moulin Lyon 3

2556-1944

Author(s):  
Abdelkader Salim El Hassar

Cet article porte essentiellement sur le débat religieux et politique suscité, en Algérie, par les éléments de la première élite politique algérienne propulsée par l’élan « Jeune Algérien », au début du XXe siècle. Il développe dans une approche analytique discursive, de nature historisante, une analyse des sujets et leurs discours imprégnés par un environnement hostile marqué par les forces de la colonisation. L’entrée en contact de l’Islam avec l’Occident colonisateur a amené certains intellectuels dont les frères Ben Ali et Larbi Fekar ainsi que leur mentor Si M’hamed Ben Rahal à s’ouvrir au monde moderne celui des sciences et des nouvelles techniques y trouvant là la solution à tous les problèmes de retard du monde musulman d’où une réflexion sur l’évolution de la pensée religieuse, en favorisant notamment la laïcité et la modernité, exigeant des réformes en introduisant la notion de droits et de liberté. Le débat sur la laïcité va entraîner en Algérie en cette période de son histoire un bouillonnement intellectuel sans précédent mettant en avant les forces du renouveau et les idées progressistes d’un âge nouveau. C’est une période charnière, remarquablement intéressante, qui va voir le jour sous l’influence d’idées et de courants qui traversaient au même moment l’Algérie et d’une manière plus générale le monde arabe et musulman sous domination coloniale. Dans le monde musulman, la laïcité, impliquant la séparation de l’Église et de l’État, était perçue comme un processus politique d’assimilation et de désislamisation dans le cheminement constant des mécanismes de la colonisation enfonçant de ce fait, dans les sentiments de la masse musulmane, mais presque sans aucune contre-réaction, le litige historique de la France avec la religion dans ce pays. Le relais « Jeune Algérien », coïncidant avec l’émergence de l’intelligentsia moderne et des premières expressions du dire politique algérien, attachera une forme d’adhésion à la notion libérale de laïcité mais exprimera par le biais de ses figures de proues, Ben Ali et Larbi Fekar, sa pensée en expliquant aussi, que dans le contexte de l’occupation, la loi sur la séparation de l’Église et de l’État véhiculait une idéologie visant l’assimilation question épineuse qui va faire réagir les intellectuels en manifestant leur désaccord. Le climat de méfiance n’était pas aussi, sans témoigner déjà des clivages sur fond même de ruptures entre les Jeunes-Algériens laïques et islamistes, prônant un Islam conservateur. Dans ce fond idéologique, la pensée libérale des premiers intellectuels algériens issus de l’école française tentera constamment, de mettre en évidence et d’expliquer, d’un côté comme de l’autre, les contradictions qui font entorse aux principes à la base des deux civilisations française et musulmane.


Author(s):  
Manuella Pinelli
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L’islam en France est incontestablement un sujet de société, très investi par la sphère politico-médiatique. Cette religion est celle de nombreux citoyens français en faisant la deuxième religion au national en termes de représentativité. Si son histoire peut remonter à l’époque coloniale, c’est surtout depuis l’implantation durable en France des travailleurs immigrés accompagnés de leurs familles que le droit positif français a évolué. Droits fondamentaux, liberté de religion, liberté d’association, organisation du culte, questions sécuritaires représentent autant les enjeux actuels qui font l’objet de ces évolutions ces dernières décennies. Toutefois, ces évolutions ne se déroulent pas sans remous mais dans un contexte de tensions sociales souvent palpables. Le Haut Conseil à l’intégration a même reconnu l’existence d’une « situation différente des religions dans l’accès au culte » qui pénaliserait le culte musulman. Il s’agit donc de questionner l’impact des tensions sociales existantes autour du fait religieux musulman, sur les évolutions du droit français de régulation de ce culte. Comment le régime juridique français tente-t-il de s’adapter au fait religieux musulman ? De quelle manière les tensions sociales se reflètent-elles au travers du régime juridique appliqué aux musulmans ? Il s’agira dans un premier temps d’aborder ces questions au prisme de l’histoire coloniale notamment afin de mettre en lumière des éléments de compréhension des tendances politico-juridiques adoptées ces dernières décennies. Force est de constater que le concept de « laïcité » ne fut pas une notion linéaire mais évolutive au fil des époques. En ce sens, la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État ne fut pas appliquée en Algérie française lors de son adoption en métropole, donnant lieu déjà à des conflits autour de la gestion publique du culte musulman. Par la suite, le droit positif s’est appliqué de la même manière pour tous les cultes présents sur le sol français ce qui a amené le culte musulman à bénéficier de la liberté de religion comme liberté fondamentale, au même titre que n’importe quel autre culte, donnant lieu notamment à la création de nombreuses associations ou encore d’écoles privées. Toutefois, on assiste ensuite au développement de la production normative plus particulièrement destinée à la gestion de l’islam donnant lieu à de nombreuses évolutions et mesures qui seront mises en exergue dans un second temps. Port du voile à l’école, organisation des services publics, ou encore interdiction de dissimulation du visage dans l’espace public sont autant de sujets qui ont fait l’objet de nouvelles mesures normatives requestionnant toujours plus les contours de la laïcité contemporaine.


Author(s):  
Yvan Issekin
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Cette contribution vise à interroger les significations des itinéraires de la neutralité chrétienne du mouvement jéhoviste au Cameroun face à un État ouvertement laïc entre 1938, année de son implantation et 2019, année de la fin de l’étude. Le contexte camerounais colonial et postcolonial correspond en effet aux configurations d’une « co-manipulation » « de la religion par l’État et des structures étatiques » (Njoya, 2006) dans la régulation symbolique du système politique. La structuration d’un quasi concordat entre l’État et les religions dans le vécu local de la laïcité conduit à une hiérarchisation charismatique des cultes au Cameroun par une dialectique étatique de classement et de déclassement des confessions religieuses. C’est dans ces configurations qu’émerge la « neutralité chrétienne » dans une remise en question de cette régulation quasi concordataire des religions au Cameroun. Cette neutralité chrétienne se définit en effet, comme un retrait volontaire des Témoins de Jéhovah des « affaires politiques des nations du monde actuel » (Zion’s Watch Tower, 1882, 8). Elle regroupe un ensemble d’attitudes et de comportements politiques dépendant d’un apolitisme religieux. Celui-ci va du refus de l’allégeance aux emblèmes nationaux (drapeau, hymne national, etc.) à l’abstention lors des scrutins électoraux. La neutralité chrétienne ou apolitisme jéhoviste apparaît transversale aux phases alternées de dissolution et de reconnaissance de ce mouvement messianique par l’État au Cameroun Blanchard, 2008). Quelles sont les différentes perceptions de la neutralité chrétienne au Cameroun ? À l’aide de l’approche socio-historique (Noiriel, 2008) et de la sociologie pragmatique (Lemieux, 2018), nous avons identifié deux grandes perceptions dans les trajectoires de la neutralité chrétienne au Cameroun. Une perception subversive de l’apolitisme jéhoviste sera d’abord dominante au cours des périodes coloniale et monopartisane. Elle précédera une autre perception liée à la relégitimation de la neutralité chrétienne au cours de la période de démocratisation du système politique camerounais. Il ressort de cette analyse que la neutralité chrétienne au Cameroun est un comportement consenti individuellement et collectivement par les Témoins de Jéhovah en vue de la survie de ce mouvement dans un contexte laïc hostile.


Author(s):  
Valérie Orange

Il n’est pas rare de lire ou d’entendre en France que la laïcité française revêt un caractère exceptionnel. Pourtant, l’observation tant du cas français que de différents cas internationaux laisse apparaître une diversité d’approches invitant plus à parler « des laïcités » que de « la laïcité ». Prenant pour hypothèse que le terme « exceptionnel » traduirait pour ses utilisateurs l’idée d’une organisation singulière, unique en son genre tant dans le temps que dans l’espace, cet article propose une argumentation déconstruisant ces deux aspects. Il met d’abord en lumière que la laïcité n’est pas immuable dans le temps. Pour ce faire, il évoque la diversité des approches de la laïcité qui ont coexisté ou se sont succédé en France du XIXe siècle à nos jours. Ensuite, il déconstruit à son tour l’idée d’une singularité spatiale. Il commence par démontrer que la laïcité française n’est pas singulière sur son propre territoire, puisque huit formes encadrées par le droit y sont actuellement en vigueur simultanément. Il survole ensuite diverses organisations de par le monde, de l’Europe à l’Asie en passant par l’Amérique du Nord. Ces différents cas mettent en évidence que les questions de gestion des relations entre le politique et le religieux se sont posées et se posent toujours dans bien des pays, sous des formes constitutionnelles ou non, et ce, parfois bien avant la France. La diversité des options locales retenues met en évidence que l’interprétation des quatre principes proposés par Milot pour décrire la laïcité (2008) (égalité, liberté de conscience, neutralité et séparation) diffère d’un pays à l’autre, de sorte que toutes les approches sont historicisées et spécifiques, et correspondent à l’un ou plusieurs des idéaltypes composant la typologie des régimes de laïcité établie par Milot. Ces applications locales apparaissent moins constituer des exceptions que des variantes. Elles s’inscrivent toutes dans les attentes du droit international supposé respecté par les pratiques des pays démocratiques en matière d’égalité de droit et de liberté de conscience. Cet article est également l’occasion de faire quelques rappels théoriques. Il distingue d’abord les processus de laïcisation et de sécularisation. Cette distinction permet de mieux saisir les différences entre, d’une part, les pays laïques, c'est-à-dire sans religion établie et/ou avec une séparation officielle entre l’Église et l’État et, d’autre part, les pays mobilisant une « laïcité de fait » dans lesquels les institutions se sont sécularisées, bien qu’il existe toujours une Église reconnue. L’article développe enfin une distinction entre sphère publique et espace public, qui permet de mieux comprendre la portée réelle de la laïcité et de saisir en quoi les attentes d’occultation du religieux contreviennent le plus souvent au cadre légal et découlent surtout d’une envie de sécularisation.


Author(s):  
Yenteme Djagba
Keyword(s):  

La multiplication des attaques terroristes en Afrique francophone en particulier au Mali et au Burkina Faso, révèle l’insuffisance d’une stratégie de lutte antiterroriste uniquement basée sur la réponse militaire et interroge sur l’impact de la laïcité dans le maintien de la paix. En tant que principe de gouvernance et d’organisation de l’État, la laïcité proclamée par les constituants du Mali et du Burkina Faso, est censée permettre à ces pays d’assurer librement leurs fonctions régulatrices et identitaires afin de mieux répondre aux besoins des citoyens. Aussi, sa violation constatée dans le fonctionnement des institutions politiques, expliquerait en partie les crises dans ces régions et leurs répercussions sur d’autres États de l’Afrique de l’ouest. A cet égard, la fragilité du Mali et du Burkina Faso au niveau socio-économique favoriserait l’implantation des groupes terroristes, facilitée parfois par le fait que l’islam y reste une religion très influente dans la vie sociale comme politique. Ainsi, c’est la question générale de la bonne gouvernance qui se pose en réalité même si elle ne devrait pas occulter celle de la pertinence civilisationnelle du principe de laïcité, appliqué à des sociétés africaines organisées suivant des logiques ethniques ou confessionnelles au-delà de la pertinence des arguments théoriques et juridique qui en font un outil pacificateur.


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