scholarly journals L’évolution de la gestion de l’islam par le droit français : entre adaptation et méfiance

Author(s):  
Manuella Pinelli
Keyword(s):  

L’islam en France est incontestablement un sujet de société, très investi par la sphère politico-médiatique. Cette religion est celle de nombreux citoyens français en faisant la deuxième religion au national en termes de représentativité. Si son histoire peut remonter à l’époque coloniale, c’est surtout depuis l’implantation durable en France des travailleurs immigrés accompagnés de leurs familles que le droit positif français a évolué. Droits fondamentaux, liberté de religion, liberté d’association, organisation du culte, questions sécuritaires représentent autant les enjeux actuels qui font l’objet de ces évolutions ces dernières décennies. Toutefois, ces évolutions ne se déroulent pas sans remous mais dans un contexte de tensions sociales souvent palpables. Le Haut Conseil à l’intégration a même reconnu l’existence d’une « situation différente des religions dans l’accès au culte » qui pénaliserait le culte musulman. Il s’agit donc de questionner l’impact des tensions sociales existantes autour du fait religieux musulman, sur les évolutions du droit français de régulation de ce culte. Comment le régime juridique français tente-t-il de s’adapter au fait religieux musulman ? De quelle manière les tensions sociales se reflètent-elles au travers du régime juridique appliqué aux musulmans ? Il s’agira dans un premier temps d’aborder ces questions au prisme de l’histoire coloniale notamment afin de mettre en lumière des éléments de compréhension des tendances politico-juridiques adoptées ces dernières décennies. Force est de constater que le concept de « laïcité » ne fut pas une notion linéaire mais évolutive au fil des époques. En ce sens, la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État ne fut pas appliquée en Algérie française lors de son adoption en métropole, donnant lieu déjà à des conflits autour de la gestion publique du culte musulman. Par la suite, le droit positif s’est appliqué de la même manière pour tous les cultes présents sur le sol français ce qui a amené le culte musulman à bénéficier de la liberté de religion comme liberté fondamentale, au même titre que n’importe quel autre culte, donnant lieu notamment à la création de nombreuses associations ou encore d’écoles privées. Toutefois, on assiste ensuite au développement de la production normative plus particulièrement destinée à la gestion de l’islam donnant lieu à de nombreuses évolutions et mesures qui seront mises en exergue dans un second temps. Port du voile à l’école, organisation des services publics, ou encore interdiction de dissimulation du visage dans l’espace public sont autant de sujets qui ont fait l’objet de nouvelles mesures normatives requestionnant toujours plus les contours de la laïcité contemporaine.

1995 ◽  
Vol 50 (3) ◽  
pp. 645-686 ◽  
Author(s):  
Bernard Derouet
Keyword(s):  

La détention en commun de biens ou de droits d'usage était l'une des bases constitutives de la notion de « communauté », dans les anciennes sociétés rurales européennes. Bien sûr, ce n'était pas la seule. Mais elle est d'un intérêt particulier, à cause de la variété des critères qui, ici ou là et selon les moments, ont pu entrer en jeu pour servir de fondement à la définition des groupes concernés. Plusieurs logiques paraissent avoir ici interféré, coexisté ou s'être affrontées, donnant lieu à des compromis ou à des conflits révélateurs. Qui a droit aux « biens communaux » ?


2015 ◽  
Vol 30 (S2) ◽  
pp. S104-S104
Author(s):  
E. Karsinti ◽  
K. Piani ◽  
R. Icick ◽  
V. Bloch ◽  
F. Bellivier ◽  
...  

La littérature suggère qu’une enfance instable engendrerait une résilience plus faible, et qu’une résilience faible serait prédictrice d’un plus haut risque de dépendance et de complications psychiatriques [1,2]. Dans ce contexte, notre objectif a été d’étudier l’ensemble de ces facteurs en une même étude afin d’affiner les trajectoires des patients consommateurs de cocaïne. Nous avons réalisé une étude préliminaire sur 200 patients régulièrement suivis dans 6 centres de soin parisiens. Nous avons évalué la résilience à l’aide de la CD-RISC [3] qui est un auto-questionnaire en 25 questions évaluant 5 dimensions et donnant lieu à un score total. De plus, nous avons procédé à des hétéro-évaluations concernant les variables psychiatriques et les antécédents familiaux (évalués rétrospectivement) et mesuré les dépendances aux différentes substances à l’aide des critères du DSM-IV. Les facteurs de vulnérabilité nous montrent que l’abus (ou dépendance) d’alcool du père, ainsi que le nombre de ruptures parentales sont associés à une plus faible résilience. L’étude des variables psychiatriques révèle qu’une faible résilience serait associée à un plus haut risque de commettre au moins une tentative de suicide dans sa vie, à un plus haut risque d’hospitalisation en service de psychiatrie et de diagnostic de schizophrénie. S’agissant des comorbidités addictives, une faible résilience est prédictrice d’un plus haut risque de dépendance aux opiacés, ainsi qu’aux benzodiazépines, et d’injection de cocaïne. Enfin, les facteurs du CD RISC sont associés à plus de sevrages hospitaliers. En reprenant la théorie de Didier, les adolescents s’intègrerait dans un groupe de pairs dépendants pour palier à une cellule familiale insecure [2]. Une faible résilience de ces patients pourrait conduire à plus de dépendance aux produits anesthésiants comme stratégie de coping. Pour aller plus loin, il pourrait être pertinent d’étudier conjointement résilience, traumatismes et style parentaux.


2011 ◽  
Vol 56 (4) ◽  
pp. 775-820
Author(s):  
Aline Grenon

Depuis l’entrée en vigueur de l’article 8.1 de la Loi d’interprétation, la Cour suprême du Canada a interprété à plusieurs reprises des lois fédérales qui pouvaient donner ouverture à l’application de cet article. À la lumière de ces arrêts, est-il possible de conclure que la Cour a freiné la tendance des tribunaux à adopter une interprétation donnant lieu à une application uniforme de la législation fédérale, et ce, à l’aide de concepts tirés de la common law ? Afin de répondre à cette question, les méthodes proposées par quatre auteurs relativement à l’application de l’article 8.1, afin de déceler les éléments sur lesquels il y a accord et ceux qui s’avèrent problématiques. Cet exercice permettra de mieux comprendre la teneur des arrêts rendus par la Cour suprême. Dans la deuxième partie, les décisions pertinentes de la Cour suprême du Canada feront l’objet d’une analyse : les énoncés de la Cour rejoignent-ils les méthodes proposées par les auteurs ? Est-il possible de déceler certaines tendances en ce qui concerne l’application de cet article ? Enfin, à la lumière de ces arrêts, la troisième et dernière partie présentera une réflexion sur l’état actuel du droit dans ce domaine et proposera certaines suggestions.


2018 ◽  
Author(s):  
Joseph Levy

Le déploiement des nouvelles technologies de communication, la diversification du cyberespace avec la mise en place de nombreux outils d’échange d’informations et de savoirs (sites, forums de discussion, communautés virtuelles, textes, images, vidéos, enregistrements sonores ) ont modifié de façon significative les enjeux disciplinaires dans les sciences sociales au plan de l’enseignement, de la recherche et des rapports de pouvoir entre centres hégémoniques et périphériques. Comment cette globalisation communicationnelle a-t-elle affecté le champ de l’anthropologie ? Au plan de l’enseignement, Forte (2002) avait déploré la timidité de cette discipline en montrant que dans les cinquante départements les plus importants dans l’anthropologie américaine, le pourcentage des professeurs intéressés à Internet et des cours traitant de ces nouvelles technologies était extrêmement faible. Plusieurs raisons, remises en question par ce chercheur, étaient avancées pour expliquer ce désintérêt (champ déjà couvert par d’autres départements, manque de matériel pour structurer un cours complet, domaine trop spécialisé, pertinence limitée pour les paradigmes anthropologiques). Cette situation pédagogique se retrouverait aussi dans les structures académiques anthropologiques canadiennes (Lévy 2009) où les cours sur Internet seraient très rares, tout comme au plan international comme le montrait la rareté des cours en anthropologie sur la cyberculture (13 cours sur 600 recensés en 2009) dans les départements américains, européens et canadiens, selon une recension effectuée par le Resource Center for Cyberculture Studies (http://rccs.usfca.edu/courselist.asp). Il reste à vérifier si cette conjoncture est encore présente aujourd’hui, mais un balayage rapide sur Internet des références sur ces cours dans le champ anthropologique indique encore qu’ils sont rares. La recension des ressources anthropologiques sur Internet suggère par contre que les carences relevées par Schwimmer (1996) ont été en partie comblées depuis avec l’accès à de nombreuses informations organisées autour de plusieurs domaines, démontrant le dynamisme et la diversité des stratégies utilisées dans l’appropriation anthropologique du cyberespace (Kotter 2005 ; Dupré, Walliser et Lévy 2011) : ressources pédagogiques pré-universitaires et universitaires, annuaires pédagogiques ; outils professionnels (institutions universitaires; annuaires anthropologiques, sites d’associations anthropologiques); sites d’actualités ; pages biographiques ; blogs et wiki ; ressources bibliographiques et audio-visuelles ; ressources muséologiques ; sites ethnographiques à base régionale). La recherche anthropologique sur le cyberespace commence à se développer dès les années 1990, quand les premières théorisations des dimensions anthropologiques du cyberespace sont associées à des perspectives de recherche (De Beer 1998 ; Escobar 1994), donnant lieu à la publication d’études de plus en plus diversifiées sur différents thèmes touchant l’ethnographie des médias digitaux: processus culturels impliqués dans les flux communicationnels, caractéristiques de ces mass-media et rapports de pouvoir, communautés virtuelles, enjeux identitaires, pratiques communicationnelles, idéologies, pouvoir et fossé numérique, dimensions éthiques; digitalisation de la culture, cinéma interactif et photographie digitale, construction des identités ; politiques culturelles, cultures digitales, transmission des savoirs, nouvelles narrativités (Wilson et Peterson 2002, Coleman 2010, De Mul 2010, Lévy et Lasserre 2011, Underberg et Zorn 2013). Les enjeux méthodologiques spécifiques à la recherche sur Internet font aussi l’objet de développements démontrant la diversité des stratégies disponibles, de la Netnographie à l’ethnographie multisites (Isomäki et McPherson, 2014). La globalisation communicationnelle a aussi réduit l’emprise exercée par les instances hégémoniques anthropologiques des universités du Nord, en particulier anglosaxonnes, sur la production des savoirs et leur circulation. La démocratisation de l’accès aux technologies de base avec la diminution des coûts, la simplification des procédures de mise en ligne des contenus et des informations, la disponibilité permanente d’Internet ont modifié les rapports de pouvoir entre centres hégémoniques et périphériques. Ceux-ci se voient fondamentalement transformés, chaque instance d’Internet devenant ainsi un espace d’expression, d’échange et d’influence, relayés par des réseaux nationaux et transnationaux permettant l’amplification de la diffusion des théories, des savoirs et des pratiques anthropologiques jusque là dédaignés et dévalorisés pour les situer dans un contexte mondial. Un exemple de ces possibilités peut être illustré par le site du RAM/WAN, le Réseau des anthropologies du monde (http://www.ram?wan.net/), un collectif d’anthropologues qui se dédie à la promotion d’une anthropologie pluraliste qui veut échapper à la dépendance aux modèles hégémoniques et favoriser l’inclusion des divers courants de réflexion, de théories et de pratiques qui se construisent dans les différents points du globe. Cette diversification est aussi associée à la multiplication des ressources pensées et gérées par les groupes socioculturels eux-mêmes qui visent à des auto-représentations et à la transmission de leur richesse patrimoniale. De nombreuses ONG mises sur pied par des anthropologues militants et des membres des groupes socioculturels se sont ainsi intéressées au développement de nouvelles pratiques, à la défense des droits, à la restitution des données et des collections ainsi qu’à la constitution de mémoires culturelles. Cette globalisation communicationnelle, en transformation rapide, constitue aujourd’hui un horizon incontournable dans la compréhension des configurations socioculturelles contemporaines et la diffusion de nouvelles approches anthropologiques moins occidentalocentriques et plus respectueuses de la diversité des perspectives présentes dans cette discipline.


2010 ◽  
Vol 55 (2) ◽  
pp. 309-328
Author(s):  
Elies Furió-Blasco

La langue est un système d’expression et de communication commun à un groupe ou une communauté linguistique. Au sein de la langue, les économistes constituent une communauté caractérisée par l’utilisation d’un langage particulier, c’est‑à‑dire une terminologie et un vocabulaire spécifiques donnant lieu à des discours spécialisés. Quatre catégories de textes économiques sont repérables : descriptifs, narratifs, explicatifs et téléologiques. Ces quatre catégories de textes se retrouvent souvent dans un même document traitant d’économie. Cependant, une catégorie prédomine sur les autres : le texte narratif. Celui-ci fait l’objet du présent article, en rapport avec la conjoncture économique. Pour l’étude d’un cas concret d’analyse économique de la conjoncture, il s’avère nécessaire d’étudier aussi le temps verbal de l’analyse. En effet, tout un éventail d’analyses économiques sont construites à partir de modèles narratifs très différents et avec des temps et des modes verbaux distincts. Le travail aborde, en premier lieu, la signification de la conjoncture économique, afin de montrer la nécessité de considérer la temporalité de la narration économique. Ensuite, et de façon sommaire, l’article s’attarde sur certaines considérations du système verbal et sur l’aspect du verbe. Pour conclure, les approches économiques qui permettent d’expliquer le comportement des sujets et des questions économiques dans le temps sont présentées.


2007 ◽  
Vol 32 (1) ◽  
pp. 79-91
Author(s):  
Paul Chamberland
Keyword(s):  

Résumé La poésie de Denis Vanier est généralement perçue comme expression de la révolte, de la transgression, de la violence, de l’obscénité et de l’abjection, bref, de l’excès. Mais une figure de rebelle outrancier ne fait-elle pas écran à l’oeuvre ? Une lecture attentive des sept derniers recueils de Vanier permet de mieux entrevoir le sujet tel qu’il se produit en son dire par l’écrit. Ce sujet apparaît comme radicalement affecté, et excédé, par l’épreuve de l’insoutenable, de provenance pulsionnelle. Les figures formées par le travail de création poétique relèvent d’un imaginaire religieux donnant lieu à une expérience du sacré dans sa dimension noire ou maléfique : le sujet s’éprouve comme prédestiné à la damnation par un Dieu radicalement mauvais, « extrémiste », auquel il s’identifie comme victime sacrificielle consentant à une « illumination par déchéance ». On analysera ici deux de ces figures : celle du meurtrier et celle du traître ou du renégat.


Protée ◽  
2010 ◽  
Vol 38 (2) ◽  
pp. 29-40
Author(s):  
Erik Bertin
Keyword(s):  

Résumé Cet article explore l’écoute de la musique comme pratique, et plus précisément le phénomène de l’audition répétée d’un même morceau de musique. Au fil des écoutes, une interaction se construit entre une forme répétée à l’identique et un sujet potentiellement soumis à des variations modales, cognitives et passionnelles. Un cycle de vie de l’écoute répétitive se dégage, qui mène du surgissement émotionnel lié à la découverte d’une musique à son appropriation progressive par le sujet, puis parfois à son déclin et à son abandon. Cette interaction répétée articule étroitement logique passionnelle et logique de la programmation, donnant lieu à différentes modulations des tensions entre ressentir et découvrir. C’est la création d’un blogue d’une quinzaine de sujets-auditeurs décrivant régulièrement leurs perceptions et leurs impressions dans un processus de familiarisation avec un morceau de musique qui a permis de constituer le corpus soumis à l’analyse sémiotique.


2014 ◽  
pp. 95-111
Author(s):  
Stéphanie Kunert
Keyword(s):  
De Re ◽  

L’analyse de discours suppose un geste préliminaire de catégorisation donnant lieu à des typologies discursives variées, permettant d’extraire du bruit du monde des corpus à analyser. Les phénomènes de circulation discursive et l’interdiscursivité impliquent cependant, qu’au-delà du geste initial de compartimentation nécessaire pour l’analyse, les discours sociaux participent les uns des autres, remettant parfois en cause les types ou genres de discours servant à l’analyse. Partant de ce paradoxe, on propose une réflexion sur la circulation discursive et les processus de re-signification interdiscursifs, qu’on illustrera en trois exemples concrets de croisement, friction, et co-construction de deux sphères de discours antagonistes que sont les discours publicitaires et les discours militants « antipub » en France, à l’époque contemporaine. Cela nous mènera à considérer l’analyse de discours non plus de façon architecturale et typologique mais comme une vaste trame de fils en interaction.


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