Les formes élémentaires, ou la naissance d’une socio-anthropologie symbolique
Si les thèses développées dans les Formes élémentaires de la vie religieuse ont subi bon nombre de critiques depuis sa parution, tant au niveau de la validité des faits relevés que de l’interprétation du totémisme, et si la théorie « sociologique » de l’essence de la religion continue évidemment de faire débat, il n’en reste pas moins que la question la plus centrale de l’ouvrage – et la plus actuelle puisqu’elle oriente la compréhension même du rôle et de la nature des sciences sociales – s’avère d’ordre ontologique : l’intelligence de la société comme réalité tant idéelle que matérielle, individuelle que collective, bref comme réalité symbolique. À partir notamment des lectures stimulantes de Karsenti et Tarot, le symbolisme sera présenté comme logique spécifique des représentations collectives, comme processus par lequel un groupe humain, tout en s’ordonnant autour d’un ensemble structuré d’idées-valeurs, ne se conçoit comme totalité concrète que par la circulation de formes sensibles maintenant les acteurs en interdépendance relationnelle.