La qualité d’emploi en France : cartographie et classification des professions d’exécution

2019 ◽  
Vol 73 (4) ◽  
pp. 840-877 ◽  
Author(s):  
Olivier Brolis ◽  
François-Xavier Devetter

Cet article vise, en s’appuyant surL’Enquête Conditions de travail(2013), à construire une typologie des professions relevant d’un statut « ouvrier » ou « employé » à partir du niveau et du type de qualité de l’emploi qu’elles induisent. Cette approche de la qualité d’emploi par les professions apparaît importante pour trois raisons complémentaires : d’abord, parce que la nature de la profession s’avère déterminante au-delà des caractéristiques des individus qui l’occupent pour expliquer les écarts en termes de qualité de l’emploi; ensuite, du fait de l’importance de la nature des professions dans la détermination des règles encadrant le travail; et, enfin, en raison du rôle joué par les politiques publiques dans le soutien de la qualité dans certaines professions.Dans un premier temps, nous élaborons un faisceau de 15 indicateurs mesurant les différentes dimensions de la qualité d’emploi en combinant des variables relatives à la relation d’emploi (rémunération notamment), au niveau d’attractivité non matériel des tâches à effectuer (comme le degré d’autonomie ou nouer des rapports sociaux de qualité) ou, encore, les conditions de travail (notamment les contraintes liées au travail ou aux pénibilités vécues par les salariés comme les pénibilités physiques).Dans un second temps, nous menons, sur la base de ces 15 indicateurs, une classification ascendante hiérarchique qui fait apparaître huit classes de professions. Les lignes de fracture qui les opposent, permettent ensuite d’établir une hiérarchisation partielle des professions en termes de qualité de l’emploi.Enfin, nous précisons la composition de ces classes (professions concernées et caractéristiques sociodémographiques des individus) et soulignons une concentration de certains types de travailleurs au sein des professions de bonne ou de mauvaise qualité.

2003 ◽  
Vol 14 (1) ◽  
pp. 9-24 ◽  
Author(s):  
Serge Genest

Résumé Un, deux, trois... bistouri Technologie, symbolisme et rapports sociaux en salle d'opération L'étude comparative des systèmes médicaux a permis que se multiplient les recherches sur le système biomédical, surtout depuis le début des années 1980. C'est dans la foulée de tels travaux que se situe cette ethnographie des salles d'opération. Construits dans un univers technologique de plus en plus sophistiqué, les rapports de travail entre infirmières, anesthésistes et chirurgiens n'en sont pas moins le produit des multiples facettes des rapports sociaux et de leur dimension symbolique. L'auteur propose d'examiner comment la technologie structure les rapports de travail, dans quel sens les rapports sociaux de la société globale influencent ce qui se passe dans la salle d'opération et jusqu'à quel point les conditions de travail permettent de reproduire les rituels qui s'y déroulent.


2014 ◽  
Vol 68 (4) ◽  
pp. 590-607 ◽  
Author(s):  
Élise Ledoux ◽  
Pierre-Sébastien Fournier ◽  
Danièle Champoux ◽  
Pascale Prud’homme ◽  
Marie Laberge ◽  
...  

Résumé Cet article présente les travaux d’une communauté de chercheurs du Réseau de recherche en santé et en sécurité du travail du Québec (RRSSTQ), créée en 2006, laquelle s’intéresse aux questions d’âges et de rapports sociaux en milieux de travail, en lien avec les conditions de travail et la santé et la sécurité du travail. De disciplines diverses (ergonomie, sociologie, psychosociologie, communication, droit, éducation), cette communauté réalise des recherches à partir d’enquêtes et d’études de terrain s’appuyant sur une approche compréhensive des phénomènes. Cette problématique se situe dans un contexte social singulier marqué, entre autres, par la mondialisation des marchés, une introduction massive des nouvelles technologies, une transformation des formes d’emploi, ainsi qu’un vieillissement de la main-d’oeuvre dans les pays industrialisés. Ces transformations créent des conditions particulières de rétention et d’intégration de la main-d’oeuvre dans les milieux de travail. À partir des données de l’Enquête québécoise sur des conditions de travail, d’emploi et de santé et de sécurité du travail (EQCOTESST), réalisée en 2008, auprès d’un échantillon représentatif de 5 071 répondants, l’objectif de cette étude est de tracer un portrait des conditions de travail en fonction de l’âge des travailleurs au Québec. L’article propose l’interprétation de ce portrait à partir d’un cadre d’analyse s’appuyant sur une approche diachronique des dynamiques âge-travail-santé dans le but de mieux orienter les interventions en milieu de travail.


Author(s):  
Isabelle Hansez ◽  
Laurent Taskin ◽  
Jacques-François Thisse

Dans ce numéro spécial de Regards économiques, trois expertises dialoguent afin d’offrir une compréhension multidisciplinaire du «télétravail» aujourd’hui et demain : D’un point de vue économique, la question clé demeure celle de l’incidence d’une pratique intensive de télétravail à domicile sur la mobilité, les villes et l’économie dans son ensemble. Le gain espéré de productivité au travail sous-tend le développement du télétravail. Souvent déclaré, mais rarement mesuré de façon précise, des rares études montrent néanmoins une relation de cause à effet entre la pratique du travail à domicile et un surcroît de productivité au travail. Mais, qu’en sera-t-il demain sur le long terme ? Et quel impact une pratique plus forte du télétravail peut-elle avoir sur la demande et l’offre immobilières dans les villes et sur les marchés locaux du travail ? Ce sont quelques-unes des analyses développées par Jacques-François Thisse, professeur émérite d’économie à l’UCLouvain. Du point de vue des organisations et du management, la pratique du télétravail a conduit à revisiter les processus de régulation du rapport au travail (tels que le contrôle et l’autonomie au travail, les styles de management, l’identité au travail, la productivité et l’équilibre entre sphères privée et professionnelle). Autre enjeu pour les entreprises ? La gestion de la distance sur les comportements au travail (notamment l’hyper connexion ou l’invisibilisation). Selon Laurent Taskin, professeur en sciences de gestion à l’UCLouvain, le futur verra s’intensifier le télétravail. L’enjeu organisationnel et managérial clé de l’après-covid sera donc de réinventer de nouvelles routines de travail autour de la présence, là où c’était la distance qui était régulée avant la crise covid. C’est cette réflexion qui permettra de préserver et valoriser l’innovation, la créativité et la socialisation. Du point de vue des individus, les recherches sur le télétravail ont identifié de longue date des effets plutôt positifs en termes de satisfaction, de motivation, de bien-être ou de fidélisation, justifiant une demande, de la part des travailleurs, pour ce type d’arrangement. Se basant sur une enquête menée durant le premier confinement en Belgique, Isabelle Hansez, professeure de psychologie à l’ULiège, offre une perspective nuancée des conditions de la pratique du télétravail durant le confinement et des perspectives affichées par les personnes sondées. Plus que jamais, semble-t-il, la dimension du bien-être au travail semble clé dans la valorisation du télétravail par les individus et montre aussi les disparités de situations (familiale, professionnelle) qui amènent à apprécier différemment la flexibilité offerte par le télétravail.   Ces trois regards se complètent et permettent, in fine, d’identifier les équilibres et les tensions qui caractérisent le développement du télétravail. Et donner des pistes qui pourront satisfaire à la fois les travailleurs, les managers, les entreprises et les acteurs qui vivent de la présence des travailleurs sur leur lieu de travail (commerces, services, entretien…) ? Voici les principaux enseignements et recommandations des trois scientifiques : L’accroissement de productivité dû à la pratique du télétravail est lié à sa fréquence : au-delà de deux jours par semaine ou de 50% du temps de travail, l’impact sur la productivité s’atténue ; Le développement du télétravail peut potentiellement modifier la consommation d’espace de bureau (décroissance) et domestique (croissance), dans un mouvement qui risque de dévitaliser les centres urbains et d’affaires ; La pratique plus intensive du télétravail menace l’existence de communautés de travail au sein des organisations, au profit de liens plus formels et instrumentaux avec l’organisation et les collectifs de travail ; Pour les travailleurs, la pratique du télétravail est source de satisfactions (autonomie, flexibilité, par exemple) mais aussi d’inconfort (ergonomie, conflit privé-professionnel, ambiguïté des attentes, par exemple) ; Les politiques publiques doivent d’urgence proposer des solutions de mobilité afin de faciliter l’accès aux centres urbains, pour les travailleurs, et juguler une potentielle désertion de ceux-ci par les quartiers d’affaire—la mobilité étant le premier facteur de choix pour le télétravail ; Les employeurs doivent formaliser la possibilité de télétravail dans des accords collectifs négociés et permettre à leurs salariés d’être dans de bonnes conditions de travail à domicile, a fortiori si le télétravail fait l’objet d’une politique organisationnelle ou de gestion des ressources humaines ; Le management doit réguler la présence des équipes de travail en tenant compte de leurs réalités propres (activités, par exemple) afin de préserver les liens sociaux, garants d’une performance de long terme ; Les travailleurs sont invités à organiser leurs temps et leurs espaces privé et professionnel de sorte à permettre une conciliation harmonieuse.


2004 ◽  
Vol 14 (2) ◽  
pp. 144-156 ◽  
Author(s):  
Alain Simonin

Résumé La notion d’espaces de transaction dans l’intervention sociale incite tous les acteurs engagés dans l’intervention, qu’ils soient « eux » ou « nous », à développer l’entreprise participative, l’innovation dans les politiques publiques, la citoyenneté inclusive. Le modèle du positionnement social permet de situer les nouveaux rapports sociaux émergents entre un pôle formel (agir sur le mode des régulations normatives), un pôle informel (agir sur le mode de l’expérience innovante) et un pôle mixte (agir sur le mode coopératif ou associatif). Le modèle a pour caractéristiques de légitimer les individus porteurs de projets dans leur aptitude à occuper l’espace public, de situer les projets dans le mouvement dialectique entre l’instituant et l’institué et de mettre en rapport les transactions avec les enjeux démocratiques et le respect de l’environnement. On peut définir trois domaines de compétences requises pour mener à bien ce processus de développement local. Ils correspondent aux trois fonctions que devrait assumer l’agent de développement : un rôle de « passeur », un rôle de « tiers médian », un rôle d’« ingénieur démocratique ».


2016 ◽  
Vol 9 (2) ◽  
pp. 49-72 ◽  
Author(s):  
Florence Chappert ◽  
Karen Messing ◽  
Éric Peltier ◽  
Jessica Riel

L’ergonomie est la discipline qui a pour objet de transformer les milieux de travail afin d’améliorer la santé. L’ergonome entreprend ses travaux à la suite d’une demande du milieu. Bien que la division des emplois, des postes et des tâches de travail selon le genre puisse poser des problèmes pour la santé et le bien-être des femmes et des hommes, rares sont les demandes en ergonomie qui portent sur le genre. En France, à partir de 2009, l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) a décidé d’adopter une approche de genre dans ses interventions. Nous présentons ici une description d’une intervention centrée sur un poste pénible occupé majoritairement par des femmes. Les résultats de cette intervention ont contribué à alimenter les activités de l’ANACT ainsi que les décisions de politiques publiques. Nous appuyant sur le bilan de cette intervention, nous examinons l’opportunité de transformer le travail des femmes et des hommes à partir d’une approche de genre employée sur le terrain. Nous constatons qu’il est difficile d’entrer et de demeurer dans les milieux de travail en parlant explicitement d’égalité, de justice et de rapports de pouvoir. Mais parler uniquement de pénibilité et de santé ne permet pas toujours d’aborder les problèmes d’organisation du travail selon le genre qui affectent différemment la santé des travailleuses et des travailleurs.


2018 ◽  
Vol 30 (2) ◽  
pp. 101-117
Author(s):  
Annie Dussuet

L’auteure propose une réflexion sur la sous-théorisation actuelle, par les féministes, du travail domestique non rémunéré. Dussuet retrace d’abord la conceptualisation de cette activité en termes de « travail domestique » et de rapports sociaux de production, durant les années 70 où elle occupe une place centrale dans le modèle d’activité des femmes. Puis, l’auteure montre les effets d’une analyse en termes de care, centrée sur le contenu du travail et l’engagement subjectif, à partir de la fin des années 80, pendant une période de montée de l’activité féminine salariée et d’externalisation de certaines tâches par les politiques publiques à la recherche de « gisements d’emploi ».


2015 ◽  
Vol 69 (4) ◽  
pp. 687-708 ◽  
Author(s):  
Catherine Delgoulet ◽  
Serge Volkoff ◽  
Laurent Caron ◽  
Fabienne Caser ◽  
Annie Jolivet ◽  
...  

La France, comme de nombreux pays occidentaux, est confrontée depuis trente ans à un vieillissement de sa population en général, et de sa population active en particulier. Dans une optique d’équilibre des systèmes de retraite, des directives de l’Union Européenne, déclinées dans chaque pays sous forme d’accords ou plans nationaux, ont eu pour objectif répété de reculer l’âge de départ en retraite et de promouvoir l’emploi des salariés les plus âgés. Les enquêtes menées jusqu’ici montrent cependant que les attitudes et les pratiques des entreprises n’évoluent pas rapidement et qu’il est judicieux de considérer les conditions de travail comme un des vecteurs du maintien en emploi des seniors. Cet article présente les résultats d’une étude empirique menée en France, à la demande du Conseil d’Orientation des Conditions de Travail (COCT), auprès de treize entreprises de taille et secteur d’activité variés qui ont inscrit dans leur plan ou accord « seniors » des dimensions relatives aux conditions de travail. Les monographies ainsi réalisées ont pour objectif d’éclairer les politiques publiques dans la perspective d’une démarche compréhensive favorisant une approche intégrée de la question du maintien en emploi des seniors. Elles permettent de pointer les limites mêmes des catégorisations que l’on pourrait tenter (« seniors », « conditions de travail », etc.) et les risques de cloisonnement associés. Elles permettent aussi de préciser la vitalité de démarches décloisonnées, leurs retombées, et les enseignements que l’on peut en tirer pour les politiques publiques.


2005 ◽  
Vol 42 (1) ◽  
pp. 9-32 ◽  
Author(s):  
Maria De Koninck ◽  
Romaine Malenfant

Les travailleuses québécoises bénéficient de mesures de protection de la maternité qui se sont améliorées au fil des années. Cependant, l'application de ces mesures ne leur procure pas nécessairement la protection souhaitée. Certaines sont congédiées lorsqu'elles deviennent enceintes, d'autres voient leurs conditions de travail se détériorer. La recherche empirique présentée ici avait pour objectif d'approfondir les connaissances sur l'expérience de la conciliation du travail et de la grossesse. En ressort un écart marqué entre les mesures légales et la mentalité observée dans les milieux de travail qui régule l'application de ces mesures. Notre interprétation est que cet écart prend sa source dans la persistance d'une vision dichotomique de la production et de la reproduction.


2010 ◽  
Vol 9 (2) ◽  
pp. 119-139
Author(s):  
Jean-Baptiste Leclercq

Résumé Cet article s’appuie sur une enquête de terrain menée dans le quartier de la Zona Norte de Grenade (Andalousie, Espagne) entre 1999 et 2006. Celle-ci a eu pour point de départ une mobilisation des chômeurs du quartier et s’est poursuivie à travers l’étude des politiques locales menées en aval dans le domaine de l’emploi, de la formation et de l’insertion. Les dispositifs qui ont succédé à ce mouvement s’appuient sur la construction de « publics cibles ». L’ethnicisation des rapports sociaux et d’autres catégorisations sont analysées à la lumière de la reconfiguration de l’État social : décentralisation, externalisation des politiques publiques au secteur associatif et activation de la protection sociale. Les discriminations sont considérées selon leur traitement et leur (co)production.


2005 ◽  
Vol 10 (2) ◽  
pp. 91-111 ◽  
Author(s):  
Jeanne Bisilliat

Cet article est fondé sur un travail de terrain de plusieurs années au Brésil sur un mouvement populaire d'habitation à Sao Paulo et sur la démocratie et la participation populaire dans la ville de Diadema. La thèse de l'auteure, après avoir montré que les mouvements sociaux sont des mouvements sexués, est d'expliquer comment les rapports sociaux de sexe concourent à formuler des objectifs de lutte qui sont devenus des enjeux collectifs pour les hommes et les femmes. La sexuation de la participation populaire a des conséquences directes sur l'existence et la nature des politiques publiques ainsi que sur la mise en oeuvre d'une citoyenneté sociale pour ceux et celles qui en sont privés.


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