Le roman intitulé Les Aventures de Télémaque, fils d’Ulysse, connut, dès sa parution ( 1699), un succès qui n’a pas eu d’éclipse. Il a fourni au moins deux termes au vocabulaire international: mentor et Salente. L’impact de l’oeuvre est inséparable de la personnalité de l’auteur: Fénelon avait publié un Traité de l’éducation des filles, qui contribua à le faire nommer précepteur du petit-fils de Louis XIV, poste qui l’achemina vers celui d’archevêque de Cambrai. Son vaste diocèse, où More avait signé la Paix des Dames en 1529, jouxtait les Flandres, et pâtissait des guerres menées sur cette frontière jusqu’à la paix d’Utrecht (1713). L’Ulysse dont il se fait le Mentor par Télémaque interposé est l’héritier présomptif du Roi-Soleil: il le promène de nation en nation pour lui faire honnir celles qui sont belliqueuses, et apprécier celles où la loi est souveraine, où l’agriculture est à l’honneur, et d’où sont bannis le luxe et l’ostentation. La palme rev ient à la république de Salente, véritable famille comme l’Utopie de More, et en outre dotée d’un climat idyllique. Louis XIV se fâcha: “Il décrie mon règne!” Bossuet s’offusqua: “écrire un roman est indigne d’un prêtre.” Mais l’oeuvre s’est imposée comme un classique.