Entre tous les acteurs de la république de Weimar et du régime nazi c'est — après Adolf Hitler — l'armée qui a suscité le plus d'intérêt. Journalistes et érudits, civils et militaires, avocats et procureurs s'accordent à lui donner un premier rôle dans la vie politique, en dépit ou à cause de son apolitisme. Dès 1938, J. Benoist-Méchin la montrait assurant la pérennité de l'Allemagne entre la grandeur de l'Empire et le « renouveau » national-socialiste; sympathique aux militaires et, plus qu'il ne l'avouait, au IIIe Reich, il en comprenait mieux les affinités que les oppositions. Puis les peuples victimes de la guerre eurent assez naturellement tendance à confondre l'uniforme gris-vert et l'uniforme brun ou noir. Encore que le tribunal de Nuremberg n'ait condamné ni l'armée allemande ni même le grand État-Major comme organisations criminelles, tous ceux qui, peu après 1945, se penchaient sur les origines de la guerre expliquaient celle-ci par la conjonction d'une tyrannie moderne avec un militarisme invétéré ; dans cette perspective, les complots militaires contre Hitler, dont on ne pouvait nier la réalité, n'apparaissaient que comme des épisodes, émouvants certes, mais voués à l'échec.