Modélisation mathématique de l'évolution, à long terme, des teneurs en nitrates dans la nappe aquifère des craies du Crétacé de Hesbaye (Belgique)
La nappe aquifère de Hesbaye, logée dans les craies du Crétacé, est sollicitée à raison de trente millions de mètres cubes par an. Bien que naturellement protégée par une épaisseur de 5 à 20 mètres de limons, de nombreux indices montrent une dégradation de la qualité des eaux souterraines, notamment par les nitrates. Les concentrations en nitrates atteignent 15 à 25 mg.l-1 dans la partie semi-captive de la nappe et sont systématiquement supérieures à 35 mg.l-1 dans la partie libre. Malgré de fortes fluctuations temporelles, les teneurs augmentent en moyenne de 0,35 mg.l-1 à 0,7 mg.l-1 par an selon la situation semi-captive ou libre de la nappe. La détermination des paramètres hydrodynamiques et de transport de la craie par plus de 35 traçages répartis sur 11 sites, a permis de réaliser un modèle local (10 km2) de transport simulant la propagation des nitrates dans la nappe. Le modèle a montré que cette dernière est, malgré une certaine homogénéisation, très sensible aux apports de surface engendrant une très forte variation spatiale des concentrations. La nappe réagit de manière très différente selon que les apports de surface sont d'origine ponctuelle ou diffuse. Pour les pollutions ponctuelles, les concentrations fluctuent rapidement avec des valeurs maximales et minimales observées respectivement en périodes de basses eaux et de hautes eaux. Cette situation est liée à un phénomène de dilution de la pollution par les eaux en provenance de l'amont. En cas de suppression d'une pollution ponctuelle, la qualité de la nappe s'améliore rapidement (délai de 1 à 2 ans). Pour les pollutions diffuses, les concentrations minimales s'observent en période de rabattement de la nappe : le front de nitrates migre plus lentement (environ 1 à 2 m par an) que les vitesses de rabattement de la nappe (jusqu'à 5 m par an) et les intrants restent nuls durant des périodes pouvant aller jusqu'à 3 ans. Différentes simulations mathématiques ont montré que si la quantité d'intrants d'origine diffuse diminue de manière permanente, la nappe mettra une vingtaine d'années pour se rééquilibrer. Ces constatations sont primordiales dans le cadre de la mise en œuvre de mesures de protection puisque, si les résultats de la suppression des pollutions ponctuelles sont rapidement mais localement observés, ceux liés à la diminution des pollutions d'origine diffuse sont observés dans des délais nettement plus longs (une à deux décennies). Ces résultats montrent clairement que toute gestion qualitative des aquifères doit être basée sur des actions à long terme.