Pendant près d’un demi-siècle, les concours du meilleur bébé constituaient l’une des attractions les plus populaires à l’Exposition nationale canadienne (CNE), une fête foraine annuelle à Toronto. Dans le cadre de ces concours, un panel de juges de la région (des médecins, généralement) attribuait des points aux bébés en fonction de catégories liées à « l’apparence saine, la beauté, les méthodes d’alimentation, l’absence de défauts physiques, la propreté, la tenue vestimentaire soignée et la proportion quant à la taille et le poids » avant d’attribuer le grand prix convoité. Tout comme d’autres sites de culture d’exposition, les concours du meilleur bébé misaient sur les pulsions scopophiliques du public et constituaient un mélange complexe de spectacle et d’édification. S’appuyant à la fois sur des études sur les concours de bébés et la culture d’exposition et sur une synthèse de la couverture médiatique des concours qui avaient lieu au CNE au début du vingtième siècle, Allison Leadley fait valoir que ces événements étaient emblématiques de la culture d’exposition dans leurs qualités formelles et stylistiques, mais aussi dans le travail performatif qu’ils mettaient en œuvre : la création, la promulgation et le maintien de nouvelles visions de la « normalité » façonnées par le domaine en pleine expansion de l’eugénisme.