Il est des phrases prononcées de façon absolument uniformes sur la planète, des mots qui résonnent au dessus des berceaux, envahissent les jeunes mères, tournent en boucle au moindre pleur d’un nouveau né ou d’un nourrisson. Les plus forts de tous, depuis toujours, se déclinent certainement en « il a faim », a-t-il faim ? A-t-il encore faim ?Pourquoi pleure-t-il alors qu’il a mangé ? Il a des coliques, et bien sur, pour les bébés nourris au sein, les inévitables : ton lait n’est pas nourrissant, tu n’as pas assez de lait, ce n’est que de l’eau de mère… Dans l’imaginaire collectif, tout mouvement d’inconfort d’un tout petit est relié au tube digestif, avant tout à la faim. Or dans notre imaginaire (si rarement dans le réel), qu’est ce que la faim ? Une sensation désagréable de manque devenant très vite synonyme de danger. Dans les jours, les semaines, qui suivent la naissance, ces questionnements prennent une tonalité encore plus angoissante. Les bouleversements de l’accouchement, l’évidente fragilité du nouveau-né, l’incohérence des réponses familiales et de tout l’environnement, l’ambivalence des jeunes mamans entre le bonheur et la panique lèvent à chaque pleur des interrogations anxieuses. Dans un tel contexte comment reconnaître les signaux de faim, et même savoir s’ils existent. Comment reconnaitre qu’il a assez mangé. Comment ne pas trop donner, comment ne pas laisser pleurer ou au contraire faut-il le laisser pleurer, quels intervalles de digestion faut-il respecter, quel nombre maximum de tétés par jour… ?