DSM-5 : pourquoi avoir supprimé le système multiaxial ?

2013 ◽  
Vol 28 (S2) ◽  
pp. 34-35
Author(s):  
S. Demazeux

L’introduction d’un système multiaxial de cotation diagnostique était, avec l’adoption d’une approche athéorique et le recours à des critères opérationnels pour définir chaque trouble mental, l’une des innovations majeures de la troisième édition du Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, publié en 1980 par l’Association psychiatrique américaine [1]. Le système multiaxial était censé incarner un « changement de paradigme » [5] dans la conception du diagnostic psychiatrique : en obligeant le clinicien à prendre en compte l’ensemble des éléments du tableau clinique, pas seulement les aspects les plus médicaux, mais aussi les facteurs psychologiques et sociaux, l’ambition du système multiaxial était d’assouplir la rigidité du modèle médical et de rectifier sa myopie quelque peu biologique. Très vite cependant, le système multiaxial montra ses limites : les facteurs de stress psychosociaux (Axes IV et V), pour des raisons de confidentialité, ne pouvaient pas faire partie du diagnostic officiel [3]. Surtout, l’articulation entre syndromes cliniques de l’Axe I et troubles de la personnalité diagnostiqués sur l’Axe II devint de plus en plus problématique : non seulement il était mesuré une importante co-occurrence des troubles mentaux à l’intérieur de chaque axe, mais la co-occurrence entre troubles de l’Axe I et ceux de l’Axe II était si massive que la question s’est posée de savoir s’il fallait y voir là une véritable « comorbidité » ou plutôt la faillite d’un système mal conçu car trop redondant [4]. Le DSM-5, paru en mai 2013, a adopté une solution radicale pour mettre fin aux embarras du système multiaxial : il a tout simplement été supprimé [2]. Dans cette présentation, il s’agira d’interroger les raisons pratiques, mais aussi profondément théoriques, qui ont amené les auteurs du DSM-5 à réorganiser en profondeur la structure de la classification.

2014 ◽  
Vol 29 (S3) ◽  
pp. 629-630
Author(s):  
P. Courtet

Il est établi que les facteurs de risque sociaux jouent un rôle important dans la genèse et le maintien des troubles mentaux. Les modèles animaux nous indiquent que les expériences précoces d’adversité sociale peuvent avoir des effets à long terme à travers un « conditionnement biologique » et que le cerveau serait « modelé » par les facteurs environnementaux. En effet, des expériences sociales négatives très précoces peuvent avoir de profonds impacts durant les périodes de haute plasticité cérébrale lors de la vie prénatale et juste après la naissance. La recherche doit arriver à intégrer plusieurs niveaux d’organisation et déterminer les effets de l’adversité précoce sur le développement du cerveau en tentant d’expliquer comment ces expériences précoces affectent les voies moléculaires, cellulaires et biologiques conduisant à une vulnérabilité particulière. Comment les circonstances difficiles prénatales, périnatales et durant l’enfance sont « biologiquement intégrées » dans les systèmes génomiques moléculaires qui déterminent les expressions de la vulnérabilité ? Le paradigme actuel des interactions GèneXEnvironnement découle directement des travaux de A. Caspi sur les enfants victimes de maltraitance, en mettant en évidence le rôle de ces évènements dans l’apparition de troubles mentaux à l’âge adulte en fonction du polymorphisme génétique.Les phénomènes d’addiction, le suicide et la schizophrénie représentent des troubles complexes qui résultent d’interactions entre plusieurs facteurs psychologiques, sociaux, environnementaux, génétiques et neurobiologiques. Les facteurs sociaux et les expériences précoces d’adversité constituent des facteurs importants et reconnus de risque d’apparition de ces troubles. La question qui se pose alors est de savoir s’il est possible d’intégrer ces différents aspects au sein de modèles unifiés où les expériences précoces d’adversité et de stress social constitueraient une dimension commune et dont le rôle serait essentiel.


2017 ◽  
Vol 46 (1) ◽  
pp. 73-97
Author(s):  
Mélanie Bolduc ◽  
Nathalie Poirier

Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un trouble complexe caractérisé par des difficultés sociales et communicationnelles et par des comportements ou intérêts restreints ou répétitifs (American Psychiatric Association [APA], 2013). Le profil clinique des enfants touchés par le TSA varie tout au long de leur développement en fonction de la présentation des symptômes, de même que par la manifestation de troubles associés, complexifiant ainsi la démarche d’évaluation diagnostique. Pour émettre un diagnostic en santé mentale, les spécialistes s’appuient majoritairement sur le Manuel Statistique et Diagnostique des Troubles Mentaux, dont la plus récente version comporte d’importants changements quant à la définition et nomenclature du TSA ([DSM-5]; APA, 2013). En dépit du DSM-5, plusieurs outils d’évaluation s’offrent aux cliniciens pour appuyer leur démarche évaluative et améliorer la précision de leur diagnostic clinique. Parmi la grande variété disponible, il peut s’avérer difficile de choisir des outils d’évaluation adaptés à la situation du jeune évalué (p.ex., âge, intensité des symptômes, langue parlée, etc.), possédant des qualités psychométriques satisfaisantes et s’arrimant avec les critères diagnostiques de la dernière version du DSM. L’objectif de cet article est de présenter la démarche d’évaluation du TSA, ainsi que de décrire et d’analyser les outils d’évaluation du TSA recommandés par les meilleures pratiques et couramment employés par les cliniciens exerçant auprès d’une population à risque de présenter ce trouble. Spécifiquement, il vise à faire une revue critique s’articulant autour des caractéristiques (objectif poursuivi, population ciblée, validations et langues offertes), des propriétés psychométriques et de la pertinence de ces outils d’évaluation en regard aux critères du TSA conformément au DSM-5. Enfin, la démarche, les outils d’évaluation à privilégier et certaines considérations cliniques sont proposés en conclusion.


2020 ◽  
Vol 59 (2) ◽  
pp. 148-155
Author(s):  
Lise Bergeron ◽  
Elissa Zavaglia ◽  
Claude Berthiaume ◽  
Réal Labelle

Le Dominique Interactif pour Adolescents-Révisé (DIA-R) est un instrument multimédia et auto-administré par les adolescents. Le DIA-R a été conçu pour dépister la dépression, plusieurs autres problèmes intériorisés ou extériorisés, les traits de la personnalité limite et la suicidalité. Cet instrument permet aussi d’évaluer la comorbidité entre différents problèmes de santé mentale. Le DIA-R mesure des symptômes ou des critères définis selon la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5). Cet article porte sur le contenu, la fidélité, la validité et l’utilité du DIA-R dans une perspective de prévention. Les qualités psychométriques de l’instrument ont été vérifiées dans une étude réalisée auprès de 447 adolescents francophones et anglophones âgés de 12 à 15 ans recrutés dans des écoles et des établissements cliniques de Montréal (Québec, Canada). Les coefficients de fidélité (cohérence interne, fidélité par test-retest) étaient excellents ou modérés. L’analyse de la validité de critère a clairement démontrée la capacité du DIA-R à prédire la dépression, la suicidalité ou d’autres conditions psychopathologiques évaluées par des mesures utilisées comme critères externes de validation. L’identification de la dépression, de la suicidalité ou d’autres formes de psychopathologie, au début de l’adolescence, demeure un enjeu majeur pour les cliniciens et les chercheurs. Le DIA-R pourrait être utile à tous les niveaux du continuum des services en santé mentale des adolescents (écoles, Centres jeunesse, cliniques de psychiatrie), dans le but de proposer des interventions appropriées contribuant ainsi à prévenir l’aggravation des problèmes de santé mentale et ultimement le suicide complété.


2014 ◽  
Vol 29 (S3) ◽  
pp. 597-598
Author(s):  
L. Silva ◽  
M. Celhay ◽  
M. Chaussin ◽  
S. Monneraud ◽  
P. Godart

Les jeunes en difficulté constituent un problème important de société et de santé publique. Une étude a été conduite par les Centres d’Examens de Santé de l’Assurance Maladie et les Missions Locales pour mieux connaître la santé mentale des jeunes [1]. Cette étude établit l’existence de fortes corrélations entre la précarité, des traumatismes vécus dans l’enfance et des troubles psychiques. Elle souligne l’importance de considérer la souffrance des jeunes dans une approche globale de leurs difficultés. Plus le jeune est en souffrance, moins il semble enclin à demander de l’aide. Les manifestations de sa souffrance et de ses troubles se déposent dans les lieux dits du social, ou bien souvent, restent enkystées dans sa famille. Dans la filiation des EMPP [2], une Équipe Mobile pour les Jeunes en Souffrance Psychique (EMJSP) a été crée et mise en place dans l’établissement psychiatrique du Centre Hospitalier des Pyrénées de Pau (64), en juin 2013. Cette équipe pluridisciplinaire – composée d’une psychiatre, d’une psychologue, d’une assistante sociale et d’une infirmière – intervient auprès des jeunes (18–25 ans) qui sont en situation de précarité et/ou qui présentent des troubles psychiques. L’EMJSP rencontre le jeune dans son environnement (institution, rue, famille), dans une posture de proximité, là où il a été identifié par un partenaire ou par sa famille. Les objectifs sont alors de prévenir l’émergence des troubles psychiques, de faciliter l’accès aux soins et de préserver le risque de rechute. Les jeunes accompagnés vers le soin présentent des troubles mentaux, des troubles de la personnalité et du comportement. Il s’agit donc d’expliciter les premiers pas d’une équipe mobile spécialisée pour les jeunes et conçue pour répondre à la complexité de leur situation intriquant des problématiques sociales, éducatives, familiales et psychiatriques ; tout comme l’a développé le Dr Tordjman [3] pour les adolescents.


2015 ◽  
Vol 5 (2) ◽  
pp. 50-54
Author(s):  
Danielle Mintsoulis

ABSTRACT:Excoriation disorder is a mental health disorder characterized by excessive picking of one’s skin resulting in clinically significant functional impairment. Diagnosing this condition has been historically challenging due to the varied associated behaviours and lack of inclusion in the Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM). As dermatologists and psychiatrists are the specialists most likely to encounter these individuals, this article discusses the new DSM-5 criteria and outlines the approaches and treatment options for these specialists to optimally manage patients with excoriation disorder.RÉSUMÉ:L’acné excoriée est un trouble de santé mentale caractérisé par le grattage et l’arrachage excessif de la peau qui mènent à une dysfonction clinique significative. Le diagnostic précis de cette condition demeure un défi lorsqu’on tient compte de la variété des comportements qui y sont associés et le manque d’inclusion des caractéristiques de ce problème de santé dans le DSM(Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux). Étant donné que les dermatologues et les psychiatres sont les spécialistes les plus susceptibles de traiter ces problèmes de santé mentale, cet article présente les nouveaux critères du DSM-5 et décrit les grandes lignes cliniques, les approches nécessaires et les options de traitement afin que ces spécialistes puissent intervenir auprès des patients avec l’acné excoriée de façon optimale.


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