scholarly journals Les « intellectuels » francophones au Québec au XIXe siècle : questions préalables

2008 ◽  
Vol 48 (2) ◽  
pp. 153-185 ◽  
Author(s):  
Yvan Lamonde

RÉSUMÉ « L'intellectuel » apparaît en France au moment de l'affaire Dreyfus et constitue une figure typique du milieu culturel français jusqu'à ses représentants les plus fameux, Jean-Paul Sartre et Albert Camus. Le substantif « intellectuel » est utilisé pour la première fois au Québec par Léon Gérin en 1901 et devient de plus en plus usuel dans l'Action française et à Parti pris en passant par André Laurendeau et la jeunesse de la Crise, chez les universitaires de l'Ecole des Sciences sociales de l'Université Laval et les collaborateurs de Cité libre et de Liberté. Le présent article tente de répondre à la question suivante : pourquoi l'intellectuel francophone ne fut-il pas possible au Québec avant 1900 ? Tout en comparant les sociétés française et québécoise, nous analysons le lexique qui désigne le phénomène et les conditions socioculturelles qui rendent possible l'intellectuel; nous proposons une mesure des professions culturelles d'où pouvait émerger cet intellectuel et nous scrutons les formes d'expression et de sociabilité du milieu culturel québécois du XIXe siècle. En ayant à l'esprit l'évolution de l'intellectuel québécois francophone au XXe siècle, nous proposons quelques explications à son émergence spécifique.

2008 ◽  
Vol 29 (2) ◽  
pp. 37-58
Author(s):  
Darío Roldán

François Furet écrit Le Passé d’une illusion, un essai critique sur l’idée communiste au XXe siècle, presque quarante ans après avoir quitté le parti où il avait milité entre 1949 et 1958. Cet essai est aussi un manifeste historiographique dans lequel une critique des « sciences sociales » escorte la revendication d’une histoire « philosophicopolitique », alors que les premiers travaux de Furet avaient été consacrés à l’étude de la structure sociale en France au XVIIIe siècle.


2005 ◽  
Vol 15 (2-3) ◽  
pp. 135-165 ◽  
Author(s):  
Jean-Charles Falardeau

Lecture empirique de la société, la sociologie n'a pu apparaître, comme les autres sciences de l'homme, qu'au stade où le mode de connaissance scientifique avait déjà prouvé sa validité dans ses explorations de l'univers physique. Les sciences de la culture ont suivi les sciences de la nature. Quelle que soit la justesse de la loi des trois états de Comte, force est de reconnaître que ces sciences de la culture, au moment où elles se manifestent, entrent en conflit avec les théologies et les philosophies auxquelles elles cherchent à se substituer. Plus qu'aucune autre des sciences de l'homme toutefois la sociologie n'a cessé de poursuivre une sorte de quête pirandellienne d'elle-même, de s'interroger sur sa nature et sur le degré d'extension de son objet, le social. Auto-interrogation et auto-justification semblent irrévocablement associées à la trame de sa réflexion. Science des phénomènes sociaux, la sociologie est aussi conscience de la société. Elle est réponse à des questions, à des défis posés par la société. Dans la mesure où elle est apparue, au début du XIXe siècle, après" que les sociétés occidentales eurent acquis un certain développement technique et des structures capitalistes, elle a été une prise de conscience de la modernisation de la société2. Prise de conscience aussi des décalages entre les idéaux professés et les conditions concrètes de l'existence collective. Aussi bien, la sociologie n'a pu manquer de manifester des caractéristiques spécifiques selon les sociétés particulières où elle a été pratiquée. Entremêlées à l'ambition de créer une science générale de la société, se sont élaborées des sociologies « nationales » : française, allemande, anglaise, américaine, russe, etc., — c'est-à-dire, des orientations de l'inquisition sociologique correspondant aux questions proposées par l'évolution de chaque société particulière, correspondant aussi aux caractères dominants de la pensée scientifique et aux modes selon lesquels chacune de ces sociétés la transmettait par son système d'enseignement. sont là des truismes. Ils devraient cependant jalonner l'ambition de quiconque entreprendrait de mettre en complète lumière la naissance et 'évolution de la sociologie au Québec : rappeler les traits marquants des états de notre société qui ont précédé et accompagné cette naissance, conditionné cette évolution ; évoquer l'histoire des idées et des mentalités ; dégager les circonstances dans lesquelles se sont manifestées les recherches scientifiques et, en particulier, celles des sciences sociales; reconstituer les transformations de l'enseignement supérieur qu'elles ont entraînées ou qui les ont rendues possibles ; retracer enfin les influences internes ou externes, directes ou indirectes qui ont joué sur les premières manifestations de la sociologie. Un volume entier suffirait à peine à réaliser un tel programme. Notre dessein est plus restreint et, tout en ne perdant pas de vue ces questions essentielles, nous tenterons plus simplement de cerner quelques-uns des facteurs qui semblent avoir été décisifs dans les étapes qu'a franchies la sociologie au Québec et de noter sa physionomie particulière à chacune de ces étapes. Précisons, si besoin en est, que nous nouslimiterons au Québec de langue française.


2016 ◽  
pp. 77-90
Author(s):  
Noriyuki Nishiyama

Le présent article cherche à dégager les principales caractéristiques de la politique de diffusion du français par l'Alliance française au XIXe siècle, en mettant l'accent sur l'Extrême-Orient, en particulier l'Indochine, la Chine et le Japon, à partir des articles publiés dans le Bulletin de l'AF. Créée en 1884, l'AF a exercé une action de propagation du français au moyen d'un soutien financier et matériel, et le Bulletin a servi à la circulation des informations relatives à l'état des lieux du français dans les pays concernés. Elle a aussi exercé une certaine influence sur la configuration des représentations du monde dans son versant colonial. Le Bulletin dévoile les actions de l'AF dans ces trois pays, qui se distinguent les uns des autres en termes de diffusion du français pour des raisons géopolitiques. La politique linguistique est soutenue en Indochine par la domination coloniale, et dans une moindre mesure en Chine, tandis que le Japon cherche à exploiter le français en faveur de la construction de l'État-nation.


2002 ◽  
Vol 57 (3) ◽  
pp. 753-772
Author(s):  
James Turner ◽  
Eli Commins

RésuméLes historiens des États-Unis présument que le mot «science», au XIXe siècle, signifiait, implicitement, les sciences naturelles, tout comme au XXe siècle. Il en résulte qu’ils attribuent les changements profonds dans la vie intellectuelle à l’importance grandissante des sciences naturelles. Une lecture plus attentive montre que «science», avant 1900, avait un sens plus large, comprenant les sciences humaines tout autant que les sciences naturelles. Cette reconsidération de la carte épistémologique de l’Amérique du XIXe siècle apporte un éclairage nouveau sur les traits déterminants de la vie intellectuelle des années post-1900, tels que l’essor des sciences sociales, la formation des universités consacrées à la recherche et l’origine de la modernité séculaire elle-même.


2008 ◽  
Vol 42 (3) ◽  
pp. 359-387 ◽  
Author(s):  
Christian Dessureault

RÉSUMÉ Crise ou modernisation? L’évolution de la société rurale bas-canadienne durant le premier tiers du XIXe siècle suscite beaucoup de controverses. Les objectifs du présent article sont de vérifier, à l’échelle micro-régionale, la croissance ou le recul de l’économie rurale et de caractériser les structures économiques et sociales au cours de cette période. L’évolution des campagnes maskoutaines s’insère dans une dynamique de transition au capitalisme. La pénétration croissante du marché entraîne l’amélioration globale des niveaux de vie et des niveaux de fortune. Elle favorise aussi la différenciation sociale de la paysannerie. L’émergence du prolétariat rural et de l’artisanat résultent à la fois de la croissance économique et de la poussée démographique. Les transformations de la société rurale ne sont toutefois ni rapides ni radicales. La société rurale est au rendez-vous de la croissance économique durant le premier tiers du XIXe siècle. Mais ce type de développement qui renforce les inégalités au sein de la société rurale ne modifie pas substantiellement les anciennes structures économiques et sociales.


2006 ◽  
Vol 32 (3) ◽  
pp. 129-142
Author(s):  
Jean-Pierre Bertrand

Résumé Dans le sillage de la contestation romanesque qui s'est fait jour à la fin du XIXe siècle, Paludes d'André Gide se présente comme la formule la plus audacieuse et la plus ludique de dépassement des modèles en vigueur. En effet, sur le mode ironique, Gide a fait pièce dans sa « sotie » aux lois du genre, notamment en instituant la contingence au principe de la composition romanesque. Le présent article se propose d'examiner sous quelles formes et par quels procédés André Gide, ainsi qu'il l'a indiqué provisoirement dans le faux titre de l'original de Paludes, « Traité de la contingence », a ouvert la voie du roman contemporain.


2003 ◽  
Vol 20 (2) ◽  
pp. 59-83 ◽  
Author(s):  
Fanny Colonna

Résumé Un regard aveuglé Anticléricalisme par excès d'humanisme universaliste en Algérie II s'agit ici de réfléchir sur l'extrême difficulté, qui semble particulière au champ français, à penser l'islam, depuis sa rencontre en Algérie, au début du XIXe siècle. L'hypothèse centrale de cette confrontation est que le statut singulier de la religion en France depuis la Révolution française, plus précisément les liens très complexes que la naissance des sciences sociales au XIXe siècle entretient avec elle, obscurcit la vision de l'islam depuis ce moment et jusqu'à aujourd'hui. On s'est concentré plus particulièrement sur un modèle qui paraît rendre compte des oscillations du savoir/non-savoir sur l'islam, depuis le premier tiers du XIXe siècle : euphémiser, minimiser (ou éradiquer) l'islam en Afrique du Nord fut plutôt le projet bien intentionné des républicains et des indigènophiles que celui des colons ou de la droite. On retrouve un surgeon de cela durant la guerre d'Algérie : le mythe d'un FLN laïque ne fut-il pas d'abord le produit d'une relation en miroir entre celui-ci et une gauche (chrétienne) encore marquée par son histoire récente avec le PCF (1940-1945). On a tenté de montrer que les racines de cette méconnaissance répétitive se trouvaient sans doute dans un anticléricalisme tenace, de nature plus cognitive qu'idéologique, qui renvoie à trois peurs : le rejet de l'Ancien Régime ; les périls que la religion ferait encourir à l'État ; le refus enfin de la croyance, de l'émotion et du non-rationnel en général, qui fonde la tyrannie du positivisme scientifique. Mots clés : Colonna, anticléricalisme, islam, chrétiens de gauche, acteurs


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