Genre, alliance et filiation dans les relations chamanes-esprits chez les Shipibo-Conibo
Résumé Cet article montre comment une collaboration scientifique poursuivie pendant vingt ans entre deux anthropologues – Françoise Morin et Bernard Saladin d’Anglure – autour d’un intérêt commun pour le chamanisme leur a permis de faire des avancées théoriques et méthodologiques en combinant leurs problématiques, en croisant leurs données et en réalisant des enquêtes sur le terrain ensemble (Sibérie nord orientale, Arctique canadien et Amazonie péruvienne). Grâce à cette collaboration, nous avons mis en lumière des rapports subtils existant entre le chamanisme et certains domaines de la vie sociale : le politique, la parenté, la sexualité, le genre et les rites de passage ; et cela, tant dans les relations humaines, que dans celles qui existent entre les chamanes et certaines entités d’apparence humaine capables de se rendre invisibles, et considérées dans la littérature ethnographique comme une catégorie d’esprits. Ces rapports ont rarement été perçus et étudiés par l’ethnographie classique plus souvent cantonnée dans une approche monographique, avec un seul chercheur, un seul groupe, un seul terrain et un cadre conceptuel déterminé à l’avance.