scholarly journals La reproduction sociale dans les familles françaises des immigrants partis de l’île de Ré au Canada au XVIIe siècle

2008 ◽  
Vol 55 (3) ◽  
pp. 345-379
Author(s):  
Claire Lambert ◽  
Yves Landry

RÉSUMÉ Cette étude cherche à cerner différents éléments ayant pu influencer la décision de 37 hommes et femmes de quitter la paroisse de Saint-Martin de l'île de Ré en direction du Canada au xviie siècle. Dans la majorité des cas, les émigrants et leurs familles, de souche martinaise, sinon rhétaise, avaient baigné dans un environnement social, économique et religieux spécifique, marqué notamment par la proximité avec le port de La Rochelle. En premier lieu, la société martinaise était profondément conditionnée par la monoculture de la vigne. Même si l'exploitation était le plus souvent de taille réduite et morcelée, les surfaces cultivées étaient en général suffisantes pour en vivre, d'autant que la pratique d'un travail annexe pouvait assurer des revenus complémentaires. Les familles des émigrants n'étaient nullement miséreuses, comme le démontre l'étude des apports au mariage. Mais, dans le but d'éviter un morcellement croissant de l'exploitation à la suite d'un partage égalitaire strict en contexte de saturation du terroir, les familles mirent en place des stratégies visant à sa préservation. Cette situation pouvait engendrer le départ de certains, les émigrants s'excluant alors eux-mêmes du partage successoral. En deuxième lieu, les futurs émigrants ont pu être sensibilisés aux voyages au long cours par suite de l'activité portuaire importante de Saint-Martin. Enfin, l'influence de La Rochelle sur l'île de Ré n'était pas seulement économique, mais également idéologique. Ce bastion de la Réforme véhiculait les idées protestantes auxquelles adhéra une partie de la population martinaise, dont quelques émigrants pour la colonie.

2020 ◽  
Vol 141 ◽  
pp. 31-39
Author(s):  
István Monok

À partir du milieu du XVIIe siècle, le livre de langue française commence à occuper une place de plus en plus importante dans les collections de l’aristocratie hongroise. Il s’agit, en premier lieu, d’ouvrages historiques et de belles-lettres mais, au milieu du XVIIIe siècle, des titres théoriques – théorie politique, philosophie – s’y rencontrent aussi en nombre croissant. Les aristocrates hongrois complètent quelquefois leurs connaissances en théologie en ayant recours à des publications de langue française. Il convient de souligner que les résultats des recherches dans le domaine de la présence du livre français paraissent confirmer l’intuition de ceux qui ont mis en valeur l’élargissement de l’abîme culturel séparant les différentes couches de la société hongroise. Les aristocrates – surtout ceux qui vivent non loin de Vienne – s’éloignent dans leur goût et dans leurs choix culturels, non seulement des intellectuels bourgeois, mais aussi de la majorité de la société nobiliaire.


2016 ◽  
Vol 6 (1) ◽  
pp. 52-71 ◽  
Author(s):  
Dhananjay Tripathi

[Full article is in English]English: This article analyzes the role of school education as a medium for indoctrinating young minds through school textbooks within the framework of India–Pakistan relations. This fact is more pronounced in Pakistan, but even in the case of India, eff orts are not undertaken to objectively teach subjects in a way that helps sensitize students about the India–Pakistan relationship. The author argues that the young generations in India and Pakistan largely lack a shared understanding until they undergo a process of de-learning and re-learning. Hence, the borders between India and Pakistan remained intact and militarized but defi nite types of borders are also created in young minds. Unless the psychological borders melt, it is diffi cult to imagine a porous physical border between India and Pakistan. This article att empts to understand how pedagogically the image of an enemy is created in young minds serving the purpose of the state.Spanish: Este artículo analiza el papel de la educación escolar como un medio para adoctrinar mentes jóvenes a través de libros de texto en el marco de las relaciones India–Pakistán. Esta situación es más pronunciada en Pakistán, pero incluso en la India, no se llevan a cabo esfuerzos para enseñar objetivamente temas que apoyen la sensibilización de los estudiantes sobre la relación India–Pakistán. El autor argumenta que jóvenes generaciones en India y Pakistán comparten la falta de un conocimiento compartido hasta que pasen por un proceso de des-aprendizaje y re-aprendizaje. En consecuencia, las fronteras entre India y Pakistán permanecen intactas y militarizadas, pero también otros tipos de definición de fronteras son creados en las mentes jóvenes. A menos que las fronteras psicológicas se derritan, es difícil imaginar una frontera física porosa entre la India y Pakistán. Este artículo busca entender cómo la imagen del enemigo es pedagógicamente creada en las mentes jóvenes sirviendo el propósito del Estado. Los casos de los libros de texto en India y Pakistán son presentados para comprender los diferentes tipos de fronteras prevalecientes en el sur de Asia.French: Cet article analyse le rôle de l’éducation scolaire comme un moyen d’endoctrinement de jeunes esprits à travers les livres scolaires dans le contexte des relations entre l’Inde et le Pakistan. Cette situation est particulièrement marquée au Pakistan mais y compris en Inde, aucun effort n’est mené pour enseigner objectivement des thèmes qui sensibilisent les élèves sur les relations Inde-Pakistan. L’auteur argumente que les jeunes générations indiennes et pakistanaises manquent de connaissances partagées jusqu’à ce qu’elles transitent par un processus de désapprentissage et de ré-apprentissage. En conséquence, les frontières entre l’Inde et le Pakistan continuent à être intactes et militarisées et d’autres types de frontières claires son créées dans les esprits de la jeunesse. À moins que les frontières psychologiques ne disparaissent, il reste difficile d’imaginer une frontière physique poreuse entre l’Inde et le Pakistan. Cet article cherche à comprendre comment l’image de l’ennemi est créée pédagogiquement dans les jeunes esprits et sert les intérêts de l’Etat.


2005 ◽  
Vol 46 (1-2) ◽  
pp. 115-130
Author(s):  
Christoph U. Schmid

Le projet d’un code civil européen a été débattu jusqu’ici surtout dans une optique privatiste et comparatiste. L’auteur adopte ici une perspective différente : celle de l’encadrement déjà existant du droit privé dans le système communautaire qui peut être appelé, avec la Cour de justice de Luxembourg, la « Constitution européenne ». Bien que les influences entre Constitution européenne et droit privé soient pour une large part bénéfiques, un phénomène fortement négatif ne saurait être ignoré : celui de l’instrumentalisation du droit privé pour des objectifs collectifs, le Marché commun en premier lieu. Dans cette situation, un avantage important d’un code civil européen s’impose : son potentiel, ignoré jusqu’ici, de limiter les dangers de l’instrumentalisation, en conférant au droit privé une voix propre parmi les disciplines juridiques européennes.


Tangence ◽  
2016 ◽  
pp. 71-90
Author(s):  
Mélanie Sag

Alors qu’on associe le souvenir des guerres de Religion dans la fiction française au genre des nouvelles historiques et galantes des années 1660, cet article montre comment le roman (sentimental, chevaleresque et d’aventures) du début du xviie siècle a été un premier lieu de mémoire de ces guerres civiles. Les diverses modalités de fictionnalisation de l’histoire ainsi que le traitement romanesque de la violence sont exposés, dans le souci de dégager la spécificité de l’approche romanesque de la guerre civile. Finalement, c’est le travail de mémoire singulier de chaque sous-genre romanesque que met en lumière cette recherche : souvenir partageable, mémoire militante des troubles ou lecture critique du passé pour mieux agir au présent. Les romans écrits entre 1599 et 1629 proposent ainsi une palette intéressante de romans « historiques », bien avant que ce genre de fiction n’apparaisse sous le règne de Louis xiv.


1958 ◽  
Vol 13 (4) ◽  
pp. 651-668
Author(s):  
Irena Gieysztorowa
Keyword(s):  

Les Guerres de la seconde moitié du XVIIe siècle, dont la Pologne était non seulement l'objectif mais aussi le lieu, principalement la guerre suédoise de 1655-1660, ont causé à ce pays de graves pertes démographiques et économiques. Les ravages de la guerre que les historiens polonais appellent « le Déluge », ne furent pas réparés avant la fin du siècle suivant. Les historiens ont imputé cette lenteur de la reconstruction à la seule gravité des désastres de la guerre. Mais des recherches récentes nous inclinent à penser que les défaites militaires ont seulement augmenté les tendances régressives qui se manifestaient dans l'ensemble de l'économie polonaise depuis la fin du XVIe siècle. C'est bien avant les guerres que la décomposition du système économique et social, due en premier lieu aux contradictions de l'économie rurale, caractérise cette situation défavorable : l'exportation de blé toujours croissante au cours de la première moitié du XVIIe siècle apparaît comme l'élément essentiel qui a aggravé les difficultés de la réserve seigneuriale, asphyxiée par le manque de main-d'œuvre servile.


2020 ◽  
Vol 5 (2-3) ◽  
pp. 181-196
Author(s):  
Myriam A. Orban
Keyword(s):  

Si l’engagement de la grande noblesse (les Guise, Bourbons, Montmorency, Coligny, Condé) dans les guerres de religion est relaté dans les livres d’histoire, la noblesse de second ordre est moins connue, et l’historiographie ignore largement les grands seigneurs de la Provence orientale qui adhérèrent à la Réforme. Parmi cette noblesse du sud-est de la France, et notamment celle possédant fiefs dans les actuels départements des Alpes-Maritimes, du Var et des Alpes-de-Haute-Provence, on peut citer des Castellane, des Oraison, des Grasse, des Grimaldi de Beuil, et des Villeneuve auxquels est consacrée cette étude. Dès 1550, les évêchés sont affaiblis par la simonie, les questions d’argent et les procès pour conserver leurs droits temporels. L’abbaye de Lérins, dont le rayonnement a décliné suite à la gestion calamiteuse sous le régime de la commende, est devenue un foyer calviniste. Des moines ont été chassés. Quelques évêques ont abjuré publiquement, d’autres sympathisent plus ou moins ouvertement avec les huguenots. Mais, le mouvement réformé ne prend véritablement racine au sein de la noblesse qu’à partir de 1559, avec la fin des guerres d’Italie et le retour des barons sur leurs terres. Certains ont été en contact avec les Allemands luthériens et en reviennent convertis à la doctrine de la « nouvelle foi ». Protégés par le gouverneur de Provence, Claude de Tende, les Grasse et les Lascaris, les Villeneuve ont entraîné parentèle, gentilshommes et notables et créé de petites communautés qui accueillent des pasteurs venus de Genève. Des partis se créent, qui brouillent la légendaire solidarité nobiliaire. Les guérillas mettent tout le pays à feu et à sang. En 1569, le baron de Vence Claude de Villeneuve, son frère Honoré de Villeneuve-Tourrettes-lès-Vence et son oncle Jean de Villeneuve-Thorenc acquièrent, lors d’enchères, des terres et les droits associés mise en vente par l’évêque Louis Grimaldi de Beuil afin de payer les décimes réclamées par la royauté pour subvenir aux guerres de religion. Il semble que leur arrière-pensée soit de reconstituer leur fief, ce qui assurerait, grâce à une alliance avec les Grasse et les Villeneuve-les-Fayence, un vaste territoire protestant. Lors de la guerre proprement provençale entre carcistes et razats, ils font de Saint-Martin-la-Pelote, Saint-Laurent-la-Bastide et le Canadel (notamment) des bastions fortifiés pour accueillir les protestants et leurs troupes. Ces guerres ont fait des ravages parmi les seigneurs. Beaucoup sont morts au combat, les autres se sont ruinés et n’ont plus les moyens d’entretenir un ministre réformé. Quand en 1589 Henri IV devient roi de France, de nombreux barons se soumettent à lui pour obtenir son pardon. Ils n’ont plus de soutien et les abjurations commencent. La fin des guerres de religion dans le sud-est provençal marque aussi celle de l’esprit de patriotisme provençal et celle de la féodalité politique et militaire, tandis que les évêques tridentins cherchent à récupérer les terres vendues par leurs prédécesseurs aux Villeneuve. Néanmoins, la Réforme protestante est bien établie dans une partie de la population. Au XVIIe siècle, les évêques des diocèses de Vence et de Grasse s’attachent lors de visites pastorales à repérer les protestants et à faire appliquer par les vicaires et les curés les préceptes de la Contre-Réforme.


2021 ◽  
Author(s):  
◽  
Neptune Prince ◽  

En 2018, on estimait à 300 000 le nombre de bidonvilles existant dans le monde et à 42% la population qui y vivait. 80 % de l’effectif se trouvaient dans les pays du Sud. Situés dans des espaces délaissés proches des villes, les bidonvilles suscitent des interrogations tant comme fait urbain incontournable que comme des territoires à risques naturels et anthropiques. En Haïti comme dans les pays du Sud, l’augmentation de la population urbaine se traduit surtout par la croissance des bidonvilles : 17 en 1950 et environ 400 en 2020. Les travaux sur les bidonvilles sont très nombreux et investiguent surtout les questions de l’habitat, l’occupation foncière, la précarité, l’habitant. Mais peu de travaux et d’approches les mobilisent pour aborder la fabrication progressive des bidonvilles. Cette thèse interroge les modalités d’appropriation foncière, d’auto-fabrication et les modes d’habiter ainsi que le jeu d’acteurs dans l’évolution des bidonvilles par le biais des « tactiques habitantes1». Les observations, les collectes de données réalisées sur le quartier de Canaan, notre terrain d’étude, ainsi que l’analyse du processus de bidonvilisation de la RMP2ont permis de mettre en évidence des phases successives de ce que nous appelons « faire ville et/ou quartier a posteriori ». En effet, si les populations de ces territoires s’installent, auto-construisent leurs habitats ; on constate qu’au bout d’un temps relativement long, il y a une forme de « normalisation » voire de reconnaissance à postériori de ces quartiers par les pouvoirs publics. C’est le cas du quartier de « Saint-Martin », créé en 1925 et devenu la ville de « Delmas » en 1982. A contrario, les villes planifiées sont conçues à partir de la maitrise foncière, de l’aménagement de l’espace suivi par la viabilisation, des programmes de construction avant que les pouvoirs publics envisagent enfin d’installer la population. A l’inverse de ce processus, la création des « villes a posteriori » se fait à partir de l’établissement spontané des populations sur des terrains souvent déclassés, de l’auto organisation, de l’auto-construction d’habitat provisoire se consolidant graduellement au fur et à mesure des rentrées d’argent, etc. Les petits commerces de proximité et le déploiement des réseaux techniques urbains se développent progressivement avant que les pouvoirs publics interviennent pour formaliser « a posteriori » cette situation urbaine de fait. In fine, nous défendons la thèse de l’existence d’une inversion de modalité de « faire la ville » que nous désignons par « l’urbanisme inversé » qui correspond à ce que nous avons observé tant en Haïti qu’au Brésil et au Pérou. En effet, dans les 3 cas, certains bidonvilles deviennent au bout de 30 à 40 ans soit des territoires intégrés à la politique de la ville au même titre que les villes planifiées ou des quartiers ou des « villes a posteriori ».


Author(s):  
Jean Leclerc
Keyword(s):  

Cet article propose une analyse de la ruse dans les farces de Molière et dans les contes de La Fontaine afin de mesurer les rapprochements et les différences entre ces deux genres. L’étude porte en premier lieu sur les enjeux éthiques et juridiques, permettant à la fois de susciter le rire auprès du public, tout en dénonçant le ridicule du personnage de la dupe, pour ensuite procéder à l’établissement d’une liste des principaux lieux communs sur lesquels se fonde cette mécanique du rire. L’article se termine sur des considérations logiques et argumentatives associées au comique de la ruse, montrant ainsi comment ces deux genres dévoilent leur dette à l’égard du climat libertin et libre-penseur du XVIIe siècle.


2021 ◽  
Vol 6 (3) ◽  
pp. 16-28
Author(s):  
Jennifer Boum Make

Dans  « Aux États-Unis d’Afrique » (2006), Abdourahman Waberi renverse le monde et instaure de nouveaux rapports de force. L’espace géographique alors renommé Etats-Unis d’Afrique, est une fabrique du pouvoir politique, social et culturel qui domine le Nord géographique des dépossédés. Dans le récit, la mise en place d’un patrimoine culturel africain suggère en premier lieu le dépouillement de ceux associés à d’anciennes puissances coloniales et dans en second lieu, une pratique conjointe de destitution et de restitution du nom. Le Nord de l’envers et les États-Unis d’Afrique de l’endroit sont non seulement les vecteurs de rapports de domination mais tracent plus précisément les contours d’un binarisme: le Sud géographique impose l’hégémonie africaine au reste du monde. Au coeur de cet espace mondial redessiné, Maya/Malaïka (prénom d’adoption), personnage central du récit, est en mouvement; quittant les États-Unis d’Afrique en quête de ses origines, elle se met en route vers le Nord, et prend le chemin du re(/dé)tour dans les dernières pages du récit. S’agirait-il là de la subversion du binarisme géographique, d’une distortion d’un modèle d’espace frontalier figé par le biais du motif de l’errance ? Ainsi, en quoi peut-on déceler dans l’oeuvre de Waberi plusieurs niveaux de déstabilisation de toute proposition binaire, qui atteignent leur culmination avec le motif de l’errance ? Dans quelles mesures, le voyage de Maya tend vers une remise en question des moules identitaires géographiques et culturels, et à quels effets ?


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